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retour vers l'accueil21° dimanche du Temps Ordinaire
« N’y a-t-il que peu de gens qui soient sauvés ? » La question angoissée que cet homme pose à Jésus pourrait être celle de beaucoup de nos contemporains, aujourd’hui.
« Peu de gens… » ça fait combien ? quelques-uns ? une centaine ?
plusieurs milliers ? des millions ? ou beaucoup plus ? ou encore, comme
l’affirment les témoins de Jéhova, seulement 144 000, pas un de plus,
pas un de moins, puisque c’est le nombre de sauvés dans le livre de
l’Apocalypse ?
Et puis, même une fois qu’on aurait une réponse sur un nombre précis,
qu’est-ce que ça changerait ? Serai-je moi-même du nombre des sauvés,
ou pas ? Et pour quelle raison ? La vraie question qui se cache
derrière celle que pose cet homme, c’est « et moi, que dois-je faire
pour être sauvé ? est-ce que j’ai mes chances ? ». Au fond, c’est cela
qui importe. Et ainsi posée, cette question peut aussi être la nôtre !
La réponse de Jésus pourrait sembler évasive. Il semble botter en
touche, comme on dit. Pas de chiffre, pas de quantité dans sa réponse :
« efforcez-vous d’entrer par la porte étroite…
» En réalité, Jésus n’esquive pas la question, mais il la recadre, il
la recentre sur l’essentiel qui n’est pas « combien ? » mais plutôt «
comment ? ».
Sa réponse contient des indications sur ce qu’est le salut. Il en donne
trois aspects : le salut est un combat ; le salut est un don et non un
dû ; le salut est offert à tous.
Le salut est d’abord un combat : « efforcez-vous d’entrer par la porte étroite
». Il est nécessaire de faire des efforts, beaucoup de monde se presse
devant cette porte qui est étroite. Il y a donc un combat. Nous le
savons tous, la vie est un combat, la vie est souvent une succession de
combats de tous ordres. Le malade doit se battre contre la maladie, le
chômeur doit se battre pour trouver un emploi, certains se battent pour
la justice… il y a bien d’autres combats encore, chacun peut aisément
allonger la liste. Le salut est donc aussi un combat, c’est pourquoi
Jésus nous rappelle que l’entrée dans le Royaume de Dieu ne se fait pas
dans la facilité.
C’est dire que le salut n’est pas un dû. Il n’y a pas de « droit au
salut ». L’illustration que donne Jésus à sa réponse n’est pas prise au
hasard. Il fait dire à ceux qui s’étonnent de ne pas être admis au
salut « nous avons mangé et bu en ta présence et tu as enseigné sur nos
places ». Nous pourrions entendre : « nous avons participé à
l’eucharistie, nous avons entendu ta parole, nous avons droit au salut
! Nous te connaissons bien, laisse-nous entrer ! » Mais le maître de
maison répondra « éloignez-vous de moi, vous qui commettez l’injustice !
». Il ne s’agit donc pas de simplement connaître Dieu et pratiquer des
rites pour avoir droit au salut. Il s’agit de pratiquer la justice,
c’est-à-dire de faire advenir l’évangile dans notre vie. Le chapitre 25
de l’évangile de Matthieu développe dans plusieurs paraboles ce que
signifie pratiquer la justice, et comment ceux qui vivent l’évangile
seront accueillis dans le Royaume de Dieu :
« J’avais faim et vous m’avez donné à
manger, j’avais soif et vous m’avez donné à boire, j’étais malade, en
prison et vous m’avez visité, nu et vous m’avez habillé… » Dieu
ne réserve donc pas automatiquement des places à ceux qui auront eu une
bonne pratique religieuse ; pas plus que le certificat de baptême ne
tient lieu de ticket d’entrée. Dieu fera entrer dans son royaume ceux
qui l’auront aimé à travers leurs frères en humanité. « Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. »
Cependant, quand bien-même nous aurions pratiqué la justice tout au
long de notre vie, le Salut ne serait pas pour autant un dû. Au-delà de
tous les efforts que nous pourrions faire, le salut n’est pas un droit
à revendiquer en fonction de nos mérites. C’est Dieu qui nous en fait
le don gratuit, sans contrepartie, comme il l’a toujours promis. Cette
promesse traverse toute la Bible, du début à la fin, tout au long de
l’ancien et du nouveau testament. Et donc le salut est offert à tous,
simplement parce que Dieu est bon, et il agit selon son bon plaisir. Et
son bon plaisir, c’est que tous soient sauvés. Jésus dit bien que la
porte est étroite, oui, mais elle est ouverte ! Et même ouverte à tous
! « On viendra de l’orient et de l’occident, du nord et du midi prendre place au festin dans le royaume de Dieu ».
L’homme qui a interrogé Jésus au début de ce passage, et toutes les
autres personnes dans la foule qui le suit, ont bien de quoi être
choqué par cette phrase. En demandant si « peu de gens » seront sauvés,
il demandait si le salut ne concerne que le peuple juif, ce qui est
déjà peu en effet par rapport à toute l’humanité, ou quelques-uns
seulement parmi les juifs, ce qui représente un nombre encore plus
restreint. Mais Jésus répond en évoquant des gens venus des quatre
points cardinaux, donc bien au-delà des frontières d’Israël pour
prendre part au festin dans le Royaume de Dieu.
Contrairement à ce que tous avaient voulu comprendre jusqu’alors, le
salut n’est pas réservé au tout petit peuple juif, même s’il est le
peuple élu.
Oui, le salut est universel, il n’est pas réservé à une élite.
Alors, puisque la question du départ – combien ? – n’est pas la bonne
question – qui est plutôt « comment ? » – que devons-nous faire pour
être du nombre des sauvés ? Pour y répondre, reprenons les trois
aspects du salut que nous venons d’évoquer. Examinons d’abord quels
sont nos combats. Combats pour la justice, pour le bien, pour nos
frères et sœurs dans la détresse, pour ceux qui ont besoin d’être
secourus. Le salut est un combat, mais le salut est aussi un don, un
don de Dieu. Demandons-nous alors, deuxièmement, de quelle manière nous
accueillons ce don. Que faisons-nous de ce don reçu ? Comment
répondons-nous à cet amour que Dieu nous donne en nous sauvant ? le
considérons-nous comme un dû, ou comme un don ? Autrement dit, quelle
est notre relation à Dieu ? Comment l’entretenons-nous, cette relation ?
Et puisque, troisièmement, le salut est offert à tous, comment
partageons-nous avec d’autres ce don que nous recevons ? Comment
faisons-nous connaître le salut de Dieu autour de nous ? quel
témoignage donnons-nous ? De quelle manière annonçons-nous l’évangile à
ceux qui ne le connaissent pas ?
En répondant, jour après jour, à ces questions, nous pourrons avancer
vers le salut qui nous est offert, en ajustant notre conduite. Nous
mènerons alors les bons combats, nous accueillerons avec joie le don de
Dieu, et nous ferons connaître à tous nos frères combien Dieu les aime
au point de leur offrir à tous, gratuitement, son salut.
Amen !
Daniel BICHET, diacre permanent.
(sur une trame du père Gérard NASLIN)
le 25 août 2019
Gorges, Boussay, Clisson
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