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20° dimanche du Temps Ordinaire

Jr 38, 4-6.8-10 ; Psaume : 39 ; He 12, 1-4 ; Lc 12, 49-53

        Je me demande comment vous avez reçu ce passage de l’évangile de St Luc que vous venez d’entendre … Si vous le découvrez pour la première fois et même si vous l’avez déjà entendu, je ne serais pas surpris que vous ayez été choqués par certaines paroles de Jésus qui sont pour le moins surprenantes et exigeantes. Alors que le Messie annoncé par les prophètes est désigné comme étant « le prince de la paix », Jésus va jusqu’à dire qu'il n'est pas venu proposer la paix mais au contraire la division.

        Nous allons essayer de clarifier ce message de Jésus qui utilise trois images fortes : le feu, le baptême du sang et la division au sein de la famille. Pour cela, prenons les propos de Jésus tels qu’ils sont et essayons de les comprendre pour en tirer des conséquences pratiques dans notre vie personnelle.

        D’abord le feu. Jésus dit à ses disciples qu’il est venu "apporter un feu sur la terre", - ou, plus littéralement : "jeter un feu", ce qui est encore plus violent. Et il ajoute qu’il voudrait que ce feu "soit déjà allumé". Pour nous, au premier abord, le feu, c’est violent. C’est la destruction. Et en ces mois d’été, des hectares de forêt brûlent comme chaque année suite à la sécheresse ou à des incendies parfois déclenchés volontairement. La télé nous montre des voitures en feu dans nos banlieues et, pire encore, des villes, voire des pays entiers en feu dans des guerres fratricides.

        Soyons rassurés : ce feu que Jésus est venu apporter sur terre, ce n'est pas un feu destructeur. Dans la Bible, le feu est souvent présent. C’est le feu du buisson ardent où Dieu se manifeste à Moïse. C’est la colonne de feu qui guide les Hébreux en marche dans le désert du Sinaï. Dans les Actes des Apôtres, ce sont bien sûr les langues de feu qui se posent sur les apôtres le jour de la Pentecôte. Le feu, dans l’Ecriture, est signe de la présence active et aimante de Dieu dans son peuple. Cet Amour qui a pris chair dans la personne de Jésus nous est transmis par l'Esprit Saint, que le Père enverra en son nom.

        Ensuite, le baptême. Jésus nous dit : « Je dois recevoir un baptême, et comme il m'en coûte d'attendre qu'il soit accompli ! » Quel est donc ce baptême ? Ce n’est celui donné par Jean Baptiste - c’est déjà fait - mais, d’un baptême particulier, celui de sa passion et de sa mort sur la croix. Il sait que l’heure n’en est pas encore venue et cela lui pèse. Il voudrait tant avoir déjà donné sa vie pour ceux qu'il aime.

        Enfin, la division. « Pensez-vous que je sois venu mettre la paix dans le monde ? Non, je vous le dis, mais plutôt la division. Car désormais cinq personnes de la même famille seront divisées…» Nous connaissons ces versets, et nous sommes toujours gênés par leur lecture car ils s’opposent à bien d’autres versets de l’Évangile et de la Bible qui disent le désir de paix de Dieu pour les hommes. Jésus est celui dont la naissance fut saluée par ces paroles : « Paix sur la terre aux hommes qu’il aime », et il est celui qui a proclamé : « Heureux, les artisans de paix ! », celui qui dira explicitement à ses disciples le Jeudi Saint : « Je vous donne la paix, je vous donne ma paix. »

        Pourtant, lorsque Marie et Joseph étaient venus présenter l’enfant Jésus au temple, le vieux prophète Siméon avait dit à Marie, en prenant l’enfant Jésus dans ses bras : « Vois, ton fils qui est là provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de division… Ainsi seront dévoilées les pensées secrètes d’un grand nombre » (Lc 2,34-35).

        Comment expliquer cette apparente contradiction ?

        Jésus n’est pas venu pour apporter la division et la guerre mais son comportement et son enseignement vont entraîner inévitablement la division, car il respectera la liberté de chacun et n’obligera personne à le suivre. Nous le voyons dans l’évangile, chaque action du Christ provoque la foi des uns et le refus des autres. « Pourquoi va-t-il manger chez les pécheurs ? De quel droit pardonne-t-il les péchés ? N’avons-nous pas raison de dire que tu es un samaritain et un pécheur ? » Le peuple de Dieu, aux paroles de Jésus, va se diviser. .Jésus, le passionné d’unité, engendre la haine autour de lui : les pharisiens et les scribes se déchaîneront contre lui.

        La division, on la rencontre aussi chez les proches de Jésus qui ont refusé de le considérer comme un envoyé de Dieu. Ce qui fera dire à Jésus qu'un prophète n'est jamais bien reçu dans son pays ou même dans sa famille. « Nul n'est prophète en son pays ». Rejeté par quantité de ses proches, il le sera de plus en plus par ses compatriotes ; non seulement en Judée, mais même en Galilée
       
        Jésus nous dit que cette « division » peut se produire également au sein d’une famille biologique : entre père et fils, mère et fille, frère et sœur, belle-fille et belle-mère. Comprenons bien : Ces conflits ne sont pas voulus par le Christ et sont toujours actuels. Dans une même famille, il peut y avoir ceux qui adhèrent au Christ et ceux qui ne s’y intéressent pas ou vont jusqu’à le rejeter. Et nous savons par expérience que ceci est douloureux. Nous connaissons tous plus ou moins cette situation. Si nos enfants ou petits enfants disent ne pas ou ne plus partager notre foi au Christ, nous ne devons bien sûr pas les rejeter mais, au contraire, leur témoigner par notre affection qu’ils sont aimés de Dieu.

        A l'époque où Luc rédige son Evangile, dans les années 80 - 90, les premiers chrétiens, du fait de leur foi, connaissaient la division au sein de leur propre famille et dans leurs communautés. Ils ont dû affronter très vite les persécutions.

        Aujourd'hui encore il existe des lieux où les chrétiens risquent leur vie. C’est le cas en Syrie, en Egypte, en Centre Afrique et dans bien d’autres pays. Prions pour eux et soyons nous aussi, dans notre quotidien, témoins de notre foi. N’oublions pas que Jésus nous demande d’aimer nos ennemis, de prier pour ceux qui nous persécutent. Sur la croix, en parlant de ses bourreaux, il va jusqu’à dire : «  Père, pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu’ils font. »

        Vivre sa foi, comme vivre sa vie n’est pas un long fleuve tranquille. Nous pouvons être tentés parfois de nous décourager. L’auteur de la lettre aux hébreux compare la foi à une épreuve, à une course d’endurance faite les yeux fixés sur Jésus. C’est pour cela que nous avons besoin de nous arrêter régulièrement pour nous ressourcer, dans la prière personnelle et communautaire. C’est ce que nous sommes en train de vivre maintenant. Au cours de cette eucharistie, demandons au Seigneur de nous donner sa paix pour en être les témoins.

André Roul, diacre permanent
18 août 2013



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