Année C
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retour vers l'accueil15° dimanche du Temps Ordinaire
Dt 30, 10-14 ; Ps 18 ; Col 1, 15-20 ; Lc 10, 25-37
Ce matin, nous voici aux pieds de Moïse, de Paul et de Luc l’évangéliste. Chacun à sa manière nous interpelle.
Mais ce matin, est-ce que j’ai tant envie que ça d’être interpelé ?
Et puis il y a « être interpellé » et « se laisser interpeller ». Dans
les deux situations, il y a un risque. Celui d’être dérangé dans mon
confort. Même si mon confort n’est pas toujours si confortable que ça.
Et même si finalement c’est nous qui nous sommes dérangés ce matin pour
venir ici.
Alors laissons-nous tranquillement et tendrement interpeller ce matin et voyons où le Seigneur, par sa Parole, nous emmène.
Moïse parle au peuple d’Israël. A ce moment du texte, c’est son dernier
discours, son testament. Il leur confie ses dernières instructions. Ce
qui lui semble essentiel.
« Cette loi que je te prescris aujourd’hui
n’est pas au-dessus de tes forces
ni hors de ton atteinte.
Elle est tout près de toi, cette Parole,
elle est dans ta bouche et dans ton cœur,
afin que tu la mettes en pratique. »
L’Alliance que le Seigneur fait avec nous est inscrite dans nos cœurs.
Point n’est besoin de grand discours ou de profonde connaissance.
Chaque homme, chaque femme, chaque enfant peut accueillir cette Parole
d’Alliance.
Puis Moïse poursuit en disant :
J'ai placé devant toi la vie et la mort,
le bonheur et la calamité; choisis la vie!
Et tu vivras alors, toi et ta postérité.
Aime l'Éternel, ton Dieu, écoute sa voix, reste-lui fidèle:
c'est là la condition de ta vie et de ta longévité.
Alors cette question : si j’observe les commandements, est-ce que je serais heureux ?
Gardons cette question pour tout à l’heure.
Revenons à Paul, maintenant. Il nous dit que Dieu veut la paix pour
tous les êtres sur la terre et dans le ciel. Et cela passe par le
Christ et le sang de sa Croix.
Arrêtons-nous une minute sur cette histoire de sang.
Dans la tradition juive, le sang est le symbole de l’âme puisqu’il
irrigue tout le corps. C’est pour cette raison, que les Juifs encore
aujourd’hui ne consomment pas d’aliment avec du sang, par respect pour
l’être vivant.
Pour nous occidentaux, nous imaginons plus volontiers l’âme dans le
cerveau. C’est notre héritage des traditions grecque et latine.
Autrement dit, le Christ en versant son sang, c’est comme s’il invitait
chacun de nous à recevoir cette part d’âme de fils et fille de Dieu.
C’est cette part d’âme qui nous permet d’appeler Dieu notre Père.
Venons-en maintenant au dialogue de Jésus avec un docteur de la Loi.
Cet homme qui connaît bien les Ecritures, pose une question à Jésus
pour le mettre à l’épreuve.
« Maître, que dois-je faire pour avoir en héritage la vie éternelle ? »
Pourquoi une telle question à votre avis ?
Est-ce seulement pour embarrasser Jésus ?
Est-ce que cet homme ne connaît pas la réponse ? La preuve que si,
c’est qu’il répond correctement à la question que lui pose Jésus.
Qu’est-ce qui peut bien se cacher derrière cette question ?
Quelque chose du genre : « Est-ce que l’Alliance que Dieu propose par Moïse conduit avec certitude la vie éternelle ? »
Vous vous souvenez de la première lecture et de la question « Si j’observe les commandements, est-ce que je serais heureux ? »
La réponse de Jésus est très claire : « Oui. La Loi de Moïse conduit à
la vie éternelle. Cette Loi qui a été déposée dans ton cœur. Fais ainsi
et tu vivras. »
Et là, comme à son habitude, Jésus nous emmène un peu plus loin en
profitant de la nouvelle question du docteur de la Loi : « Et qui est
mon prochain ? »
Il nous raconte la parabole du bon Samaritain.
Après avoir été roué de coups et laissé pour mort, le prêtre et le
lévite, deux hommes pourtant religieux, se détournent de l’homme laissé
à terre et passent leur chemin.
Souvent, on comprend cette attitude par leur rapport à la pureté
rituelle : s’ils touchent cet homme touché par des brigands aux mains
impures, c’est eux qui alors seront impurs et devront se purifier une
fois rentrés à la maison.
Une autre question pourrait être : « Ont-ils peur ? » Sans doute un
peu. Vous pensez, un blessé. Quelles peuvent être ses réactions ?
On peut imaginer aussi qu’ils pourraient avoir peur de se lancer dans une nouvelle relation humaine à l’avenir incertain.
Pour résumer, ils ont peur de se mouiller. Au sens propre par rapport
au rite de la purification, et au sens figuré, en acceptant d’engager
une relation avec un inconnu.
Arrive alors le Samaritain. Rien que dire son origine dans le contexte
de la Judée de l’époque, provoque un rejet immédiat de la part des
auditeurs de Jésus. En effet, les Juifs et les Samaritains ne veulent
rien à voir entre eux. Rappelez-vous le début de l’histoire de la
Samaritaine avec Jésus.
Ce sera cet homme originaire de Samarie, un étranger, qui voyant
l’homme à terre, sera saisi de compassion. « Saisi de compassion »,
c’est exactement le même terme que l’on utilise pour dire quand Dieu
est saisi de compassion pour nous, quand ses entrailles frémissent et
que s’exerce sa miséricorde de Père. Un peu comme quand nous souffrons
pour nos enfants.
Ce Samaritain est tout à fait étonnant. Il agit selon les principes de
l’Action catholique puisqu’il « voit, juge et agit. » Il ne calcule pas
son effort, ni son argent d’ailleurs. Il est pris par la compassion
pour cet homme. Il est tout à cet homme sur le bord du chemin.
Bien sûr, il s’agit d’une parabole dont l’un des premiers buts est de permettre à celui qui écoute de s’identifier.
Pour nous qu’en est-il ?
Eh bien, je peux parler pour moi : je suis les trois personnages à la
fois. Je suis le prêtre et le lévite quand je détourne mon regard de
ces hommes, femmes et enfants qui encombrent mon regard, et sollicitent
mon temps et surtout mon argent.
Et je suis aussi le Samaritain quand je me laisse émouvoir par une
personne, un regard, une attitude, un soupir, et que j’accepte de faire
un bout de chemin avec cette personne.
Et surtout, je suis le quatrième homme sur le bord du chemin quand je
suis pris dans mes soucis qui m’empêchent de dormir, quand j’ai peur
pour mes enfants ou pour ma famille.
Et Dieu inlassablement vient me chercher.
D’ailleurs, comment appelle-t-on cette parabole ? Celle du Bon Samaritain.
Le Bon Samaritain. Vous souvenez-vous de la réplique de Jésus à quelqu’un qui l’appelait « Bon maître » ?
« Nul n’est bon que Dieu seul. » répond Jésus.
Alors dans cette image du Samaritain, rejeté parce que différent, mais
tellement ouvert sur l’autre, Jésus nous parle du Père. Ce père qui ne
s’arrête pas à nos apparences, ce père qui s’approche de nous malgré
nos misères, ce père qui nous sécurise, qui nous console et nous
nourrit.
Pendant cette eucharistie, prenons un moment pour nous laisser regarder
par le Père et l’entendre nous dire « tu as du prix à mes yeux, et je
t’aime. »
Michel BERDAH, diacre permanent
10 juillet 2016
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