Année C
Sommaire année C
retour vers l'accueil
14° dimanche du Temps Ordinaire


Is 66, 10-14c ; Ps 65 (66), 1-3a, 4-5, 6-7a, 16.20 ; Ga 6, 14-18 ; Lc 10, 1-12.17-2

« Que la croix de notre Seigneur Jésus Christ
reste ma seule fierté
» nous dit St Paul au tout début de la deuxième lecture. La croix, une fierté ?

Commençons par apporter un petit éclairage sur ce passage, pour éviter toute confusion. Quand St Paul parle de « la croix du Christ », ce n’est pas pour qu’on le considère, lui, Paul, comme le promoteur d’une religion doloriste, comme on l’entend parfois, ici ou là. Quand St Paul parle de la croix, ce n’est pas de cet assemblage de bois ayant servi à supplicier un condamné. Ce n’est pas de l’objet en tant que tel, qui reste un objet de vénération. Pour Paul, la croix du Christ, c’est un événement. L’événement du salut. Saint Paul nous invite à élever notre regard, à quitter notre vision matérielle pour accéder à une vision spirituelle de la croix. Car il s’agit du salut du monde ! Rien de moins !

Cet événement, « la croix du Christ », est donc central. D’ailleurs, les concepteurs des premiers calendriers, dès les premiers siècles, ont parfaitement intégré l’importance centrale, unique et inégalable de cet événement : On compte les années « avant Jésus-Christ » et « après Jésus-Christ ». Avant le salut, et après le salut. La croix, c’est le centre de l’histoire humaine. Il y a un avant, il y a un après, et au milieu, la croix du Christ.

Ce calendrier a même fini par être adopté par la terre entière, et aujourd’hui nous sommes en 2022 « après Jésus-Christ » pour toutes les nations, même celles qui ne reconnaissent pas le Christ comme leur sauveur. Il y a donc bien lieu d’être fier de la croix du Christ, comme Saint Paul !

Pourtant, nous le constatons tous, des premiers signes de remise en cause de cette conception universelle apparaissent aujourd’hui, chez nous en occident, et singulièrement en France. Certains tendent à vouloir effacer cette évidence. On appelle ça la « culture de l’effacement » : dans plusieurs musées que nous avons visités récemment, nous avons remarqué que les mentions « avant JC » et « après JC » disparaissent pour devenir « avant notre ère » et « de notre ère ».

« Notre ère » ! Comme si le temps pouvait être nôtre, comme si l’homme était maître du temps !

La tentation de l’homme, depuis toujours, c’est la toute-puissance, c’est l’illusion de vouloir tout maîtriser, afin de pouvoir se passer de Dieu. La grande tentation, c’est de se faire Dieu ! l’homme s’épuise à vouloir maîtriser ce qui en réalité lui échappera toujours : le temps, mais aussi la vie, la mort, le bien, le mal…

On perçoit une trace de cette tentation de maîtrise dans l’évangile de ce jour : Les 72 disciples reviennent tout joyeux de leur mission : « même les démons nous sont soumis » ! Les disciples s’enthousiasment de constater le pouvoir qu’ils ont sur les démons. Ils découvrent la jubilation d’exercer un pouvoir. Mais Jésus les met en garde contre cette tentation : « Ne vous réjouissez pas parce que les esprits vous sont soumis ; mais réjouissez-vous parce que vos noms se trouvent inscrits dans les cieux. » On le voit, c’est bien du salut dont il s’agit : « vos noms se trouvent inscrits dans les cieux », ça veut dire « le ciel vous attend, vous avancez vers votre salut ». Pour Jésus, c’est ça qui est important, c’est ça qui doit nous réjouir. La joie que les disciples expriment doit être réorientée vers le vrai objectif : leur propre salut, et le salut du monde. C’est justement la raison d’être de la croix du Christ.

 

Ce récit de l’envoi en mission des 72 disciples nous rappelle que la mission d’annoncer au monde le salut n’est pas limitée à quelques-uns, à une élite cléricale, mais concerne chacun de nous, depuis notre baptême. 72, ce n’est pas n’importe quel nombre. Soixante-douze, c’est trois fois douze plus encore trois fois douze. A partir du noyau des douze qu’il a choisis au départ, Jésus envoie en mission trois fois plus de disciples, et à nouveau trois fois plus. Cette expansion considérable est le signe de l’universalité de la mission. En fait, tous ceux qui suivent Jésus sont envoyés. Pas seulement les plus proches, les intimes, les douze. La mission de tous les disciples est d’annoncer l’Évangile à tous.

Et en quoi consiste cette mission ? « Guérissez les malades et dites-leurs : le règne de Dieu s’est approché de vous ».

De même, nous aussi, disciples du Christ Jésus, nous devons entendre pour nous-mêmes cette injonction. Guérir les malades, c’est faire le bien autour de nous ; et dire à tous « le règne de Dieu s’est approché de vous », c’est mettre des mots sur le bien que nous faisons. C’est annoncer le salut à chacun, puisque le règne de Dieu, c’est le salut présent au milieu de nous. Nous en revenons encore à la croix du Christ, l’événement qui apporte le salut au monde.

Oui, frères et sœurs, les 72, c’est nous ! Ce ne sont pas seulement le pape et les évêques, les prêtres, les diacres, les religieux et les religieuses, les moines et les moniales, bref, les autres ! Les 72, c’est chacun de nous, individuellement. Mais ce sont aussi toutes les structures d’Église dont nous sommes les membres. Notre paroisse en est une. Elle est donc, en tant que telle, chargée de cette mission d’évangélisation demandée par Jésus lui-même. Le projet paroissial missionnaire que nous bâtissons ensemble depuis plusieurs années est un des outils qui contribuent à mettre en œuvre cette mission où Jésus nous envoie. Et donc, chacun de nous doit s’interroger sur sa contribution personnelle à ce projet paroissial missionnaire. Ce ne sont pas les possibilités qui manquent pour s’y investir ! Chacun peut y trouver sa place. Quelles que soient ses compétences, ses moyens, ses désirs, sa sensibilité, chacun peut apporter sa pierre à l’édifice. Le projet paroissial missionnaire, ce n’est pas l’affaire du curé, c’est notre affaire à tous !

Et justement, comme un signe de la vitalité de notre paroisse, ce matin, nous accueillons Etienne qui fait son entrée en catéchuménat. Il commence un chemin pour mieux comprendre la foi des chrétiens et mieux connaître ce Dieu dont il ressent l’appel intérieur. Ce cheminement l’amènera peut-être à demander le baptême dans quelques mois. Alors, réjouissons-nous d’abord de voir que Dieu continue d’appeler aujourd’hui, chez nous ! ici et maintenant ! Et accueillons comme il se doit ce nouveau catéchumène, signe que l’événement de la croix du Christ est toujours d’actualité : le règne de Dieu s’est approché de nous !

 

Amen !

Daniel BICHET, diacre permanent

Saint Hilaire de Clisson et Clisson

3 juillet 2022



Sommaire année C
retour vers l'accueil