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        Eh bien, voici un passage d’Evangile où Jésus ne cherche pas à plaire, c’est le moins que l’on puisse dire. C’est d’abord Jacques et Jean qui se prennent un savon parce qu’ils ont osé envisager d’appeler le feu du ciel sur un village Samaritain qui avait refusé de les recevoir. (Ils n’ont pas volé leur surnom : les Fils du tonnerre !) Et puis, en cours de route, trois hommes qui annoncent leur projet de suivre Jésus, dont un qu’il a lui-même appelé, reçoivent des consignes tellement sévères qu’on s’étonne qu’ils n’aient pas fait demi-tour. Miséricordieux envers ceux qui ont refusé de l’accueillir, Jésus se montre terriblement exigent envers ceux qui veulent le suivre ; on peut comprendre la boutade de Ste Thérèse d’Avila : « Seigneur, si vous traitez ainsi vos amis, ne vous étonnez pas d’en avoir si peu ! » Mais quand Dieu appelle quelqu’un, c’est pour lui confier une mission, et chacun est libre de répondre ou pas à cet appel.

        C’est le message de la vocation d’Elisée par le prophète Elie dans le livre des Rois. C’est bien Dieu qui envoie Elie pour transmettre son appel à Elisée, et symboliquement, Elie jette son manteau vers lui pour qu’il l’enfile et qu’il se revête de sa mission. Cet appel rejoint Elisée au cœur de sa vie quotidienne, comme chacun de nous. Il est en train de labourer le douzième arpent de son champ. Dans la Bible, le chiffre douze est le signe de l’accomplissement : au moment où il entend l’appel, Elisée a accompli le premier versant de sa vie. Il pourrait s’installer dans le contentement du « devoir accompli » et savourer sa retraite, mais Dieu l’invite à s’engager sans attendre dans un nouveau champ. Elisée a très bien compris le geste d’Elie, mais il prend le temps d’accomplir ce qu’il considère comme son devoir : embrasser son père et sa mère et manger une dernière fois avec eux. Elie lui répond : « Va-t-en, retourne là-bas ! Je n’ai rien fait. » Ce que l’on pourrait prendre pour un geste d’humeur, n’est en fait que le rappel de la liberté totale d’Elisée quant à sa réponse ; Elie n’a pas repris son manteau, mais il veut lui faire comprendre que cette vocation, s’il l’accepte, implique un choix radical, une rupture. Le geste d’Elisée est très significatif : il tue les deux bœufs et brûle l’attelage pour les faire cuire et faire un repas d’adieu pour toute la maison. Désormais, plus rien ne le retient ; il ne possède plus rien, il est totalement libre pour se mettre au service d’Elie, pour la mission que Dieu voudra.

        De même, dans sa marche vers Jérusalem, où il sait qu’il va souffrir sa passion et donner sa vie, Jésus n’oblige personne à le suivre. Mais à celles et ceux qui veulent le suivre, Jésus donne des exigences pour qu’ils soient vraiment libres :

        1ère exigence : « N’avoir aucun lieu pour reposer sa tête. » Avoir un chez soi est pourtant un besoin vital, mais pas au prix d’aliéner sa liberté. Beaucoup de nos contemporains ont dû s’expatrier pour avoir osé s’opposer aux régimes totalitaires qui gouvernent leurs pays. Et parmi eux, de nombreux chrétiens qui veulent défendre une certaine idée de l’homme, de la femme, et de leur dignité. Pour s’engager, le disciple de Jésus doit être capable de rupture. Autant dire que tout ce qui contribue à nous installer freine inexorablement notre marche à la suite du Christ.

        2ème exigence : « Laisse les morts enterrer leurs morts. Toi, va annoncer le Royaume de Dieu. » Il y a urgence, et l’urgence est toujours du côté de la vie. Il y a urgence à annoncer le Royaume de Dieu. Il y a urgence a annoncer l’Evangile dans sa radicalité : et la radicalité de la Bonne Nouvelle, c’est le salut de la personne. Avant de discerner où est le bien et le mal, l’Evangile nous invite à découvrir d’abord ce qui est bon pour l’homme blessé, afin de lui redonner toute son humanité.
3ème exigence : « Ne pas regarder en arrière » ! C’est résolument vers l’avenir que Dieu nous pousse. Nous ne sommes pas des hommes et des femmes à ressasser les vieux souvenirs. Notre Dieu est le Dieu de la promesse. Dans sa longue montée vers Jérusalem, Jésus lui-même vit, dans la liberté, chacune de ces exigences. Et pour que nous puissions le suivre, il fait de nous des hommes et des femmes libres.

        C’est ce que St Paul nous rappelle dans la lettre aux Galates : « Vous avez été appelés à la liberté. Mais que cette liberté ne soit pas un prétexte pour satisfaire votre égoïsme. » Et Paul explique que cette liberté consiste à nous mettre « au service les uns des autres par l’amour » Là est le paradoxe de l’amour : quand nous nous plaçons par amour au service des autres, et quand, renonçant à nos tendances égoïstes, nous nous oublions nous-mêmes et sommes attentifs aux besoins des autres, nous sommes libres. C’est peut-être un des enseignements du rassemblement Diaconia 2013 à Lourdes. Nous sommes appelés à la liberté de l’amour ! Oui, pour être libres, il faut aimer.
Dans le quotidien de mes activités, comment puis-je mieux laisser résonner l’appel du Seigneur ?  A quel « champ » nouveau, à quelle liberté nouvelle, m’invite-t-il ?  Que me faut-il « brûler » pour mieux le suivre et me vêtir de son « manteau » d’Evangile ?

Jean-Jacques BOURGOIS, diacre permanent
30 juin 2013
Le Clion, Ste Marie et Pornic

 



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