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Vendredi Saint

Pardonne-leur

Isaïe l’avait annoncé 6 à 700 ans plus tôt et l’évangile de ce jour, nous donne de réentendre l’absurdité d’une violence déchaînée qui mène Jésus, le Serviteur, au tombeau. Ce récit a une dimension intemporelle et spectaculaire au point que nombre d’artistes l’ont retranscrit en musique, peinture, spectacle vivant, film ou sous d’autres formes, comme pour se défaire de la douleur qui assaille le croyant mais aussi chaque personne sensible, compatissante, pleinement humaine.
De retour à Jérusalem, Jésus est accueilli comme l’Envoyé, le Sauveur tant attendu. Il va ensuite prendre son dernier repas avec ses apôtres en leur confiant ses dernières instructions « vous devez vous laver les pieds les uns les autres » et « c’est un exemple que je vous ai donné ! » Puis éclate la tragédie : trahison, arrestation, jugement infâme avec son lot de marchandage entre juifs et romains, condamnation et l’apothéose de l’ignominie : la mise à mort sur une croix. Violence, mensonges, manipulations…tout s’enchaîne sans faille. C’en est presque irréel ! Pourtant il en meurt. À sa suite les apôtres vont, pratiquement tous, vivre des choses équivalentes. Intemporel car tant de femmes, d’hommes, d’enfants ont vécu, et vivent aujourd’hui encore, le même martyre : condamnés à tort pour leur couleur de peau, pour leur sexe, pour leurs actes d’humanité, leur religion, leurs pensées, leur foi en Christ ou plus simplement leur foi en la liberté, en la justice, en l’homme ! Malgré ces relectures annuelles, nous ne pouvons nous y habituer !
Je propose ce soir deux courtes méditations sur 2 paroles du Christ en croix.
Jésus vient de vivre les pires outrages, la violence pure et quelle est sa prière ? « Père pardonne-leur ! » Si Jésus prie son Père de pardonner à ses bourreaux c’est que lui-même leur a déjà pardonné. Jésus sait pourquoi il est venu : pour sauver l’homme de son péché. S’il ne leur avait pas pardonné, il aurait ajouté du péché…
aux péchés de ses tortionnaires. Partout où il passait, il enseignait le pardon, aujourd’hui il l’incarne ! Et pour qu’il soit absolu et parfait, il prie son Père de le rejoindre sur ce sommet de Charité. Pour ma part, je ne peux pas dissocier cette demande à ce qu’il a laissé à ses apôtres la veille : « c’est un exemple que je vous ai donné ! ». Mon propre pardon n’est efficace que donné avec et par le Christ et il ne sera pleinement fécond que si je demande à Jésus de le porter, avec moi, au Père. « Père pardonne-leur ! »
Sur cette croix, Jésus sait que sa fin est proche. Encore conscient, il voit à ses pieds, sa mère, sa tante, son amie et l’apôtre proche de son cœur, présences tout aussi réconfortantes que bouleversantes. À sa mère, sans doute veuve, il confie le plus jeune de ses apôtres, Jean. À ce tout jeune homme, il confie celle qui l’a porté, mis au monde, élevé pour faire de Lui un homme pur et doux : « Femme, voici ton fils, fils, voici ta mère ». Jésus se dépouille encore un peu plus ! Il ne peut plus garder, pour lui seul, ses liens d’affection ou de parenté. Son Père, il en a déjà fait NOTRE Père, sa mère il en fait la mère de Jean et par là même notre mère à tous, son ami, il en fait son frère, notre frère.
Se dépouiller de ses liens pour que nous accueillons son Père comme notre propre père et que l’on se sache aimé de Lui. Sa mère comme notre mère pour que vivions en frères avec Lui, Jésus. Son ami comme notre frère pour que nous voyons en Jean, celui qui va nous mettre dans les pas du Christ, par sa vie auprès de Marie et par son Évangile.
« Tout est accompli ! » Et la Parole s’éteint. Le silence tombe sur le monde et ses habitants. Le lourd silence du tombeau va persister jusqu’au matin de Pâques, jusqu’au bruissement de la lumière de la résurrection. Mais, ce soir, devant cette croix, en silence, prions.


Patrick DOUEZ, diacre permanent
le 2 avril 2021

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