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2° dimanche de l'Avent



Pas de doute, nous sommes bien dans l’Avent ! Les textes que nous venons d’entendre nous parlent tous de cette attente, d’une nouveauté à venir, de bouleversements qui se préparent : « Voici le Seigneur Dieu, il vient avec puissance » ; « la vérité germera de la terre, et du ciel se penchera la justice » ; « ce que nous attendons, c’est un ciel nouveau et une terre nouvelle où résidera la justice » ; « voici venir derrière moi celui qui est plus puissant que moi ».
Oui, il va se passer quelque chose, c’est sûr ! Mais quoi ? Dieu arrive ! C’est impensable ! Dieu, celui qui est le créateur de toute chose, celui qui est plus grand que tout ce l’on peut imaginer, celui qui est la transcendance même, vient à la rencontre de l’homme ! Et nous savons qu’il n’arrivera pas comme un chef d’état, en grande pompe, avec son escorte et ses serviteurs, avec des dizaines de journalistes et de photographes convoqués pour l’occasion. Au contraire, il vient dans la plus grande discrétion, dans la plus grande humilité, en se faisant l’un d’entre nous, petit enfant dans une étable, en partageant sans aucun privilège notre condition humaine. Étonnant, tout de même ! Étonnants aussi, les textes d’aujourd’hui, qui nous annoncent sa venue. Ils nous situent le lieu de cette annonce : dans le désert ! Qui aurait idée d’annoncer un si grand événement dans un désert ? Comme dans la phrase d’Isaïe de la première lecture, c’est pourtant bien dans le désert que Jean-Baptiste proclame son message. Et pourtant, St Marc nous dit que « toute la Judée, tout Jérusalem venait à lui. » Mais qui est-il donc ce Jean, qui fait ainsi se déplacer les foules jusqu’à repeupler le désert ? Que nous dit-on de lui ? « Il était vêtu de poil de chameau, avec une ceinture de cuir autour des reins ». Les détails vestimentaires sont plutôt rares dans la Bible. Et celui-ci pourrait nous sembler anodin, voire incongru. Mais il reprend en fait la description du grand prophète Elie, tel qu’il est présenté dans les textes anciens de la Bible. Pour les auditeurs de St Marc, il y a là plus qu’une allusion. On disait d’ailleurs à l’époque de Jésus que le prophète Elie reviendrait lui-même annoncer la venue du Messie. Jean-Baptiste est donc bien à comprendre comme le nouvel Elie, celui qui annonce, en tout temps, la venue tant désirée du Sauveur de son peuple. Tant désirée ? On pourrait en douter, en regardant notre monde qui semble de plus en plus rejeter Dieu et tout ce qui y fait référence. Pourtant, en y regardant de plus près, on peut se rendre compte que ce monde est bel et bien en attente. Peut-être pas de Dieu, mais en attente de quelque chose, d’un sauveur d’une certaine manière. Mais il ne sait pas où le trouver, et sa quête passe parfois par des voies qui s’avèrent être des impasses. Où donc trouver ce libérateur ? Faut-il suivre ceux qui le cherchent dans une fuite éperdue vers une prétendue libération individuelle, qui n’est souvent qu’un égoïsme qui ne dit pas son nom ? Ou bien faut-il suivre ces autres qui se jettent dans la course à la consommation ? Faut-il plutôt chercher du côté des performances en tout genre, du sport, de la sexualité, des honneurs de la célébrité, de la course aux diplômes ou aux médailles ? Où chercher le Sauveur ? Et pourquoi pas justement dans le désert ? Le désert, lieu hostile, où l’on risque de se perdre, de mourir de soif, écrasé par la chaleur. Mais le désert est aussi le lieu de la vérité. Lieu où tout reprend sa vraie place, lieu où beaucoup de choses qui nous paraissent indispensables se révèlent inutiles. Lieu du dénuement. Lieu où la vie se révèle comme le seul bien que l’on possède, supérieur à tout autre. Lieu du manque, donc du désir, donc de l’attente. Faire l’expérience du désert nous plonge dans cette attitude d’attente. C’est bien dans le désert que l’on peut le mieux entendre cet appel à la conversion, par la voix de Jean-Baptiste. Car l’annonce de Celui qui vient est toujours accompagnée de cet appel à la purification de nos vies. Purification, et pas seulement confession des péchés. Il s’agit moins d’essayer de devenir meilleur, que de devenir autre : préparer le chemin du Seigneur, que tout ravin soit comblé, que toute colline soit abaissée, que nos passages tortueux deviennent droits. Alors, où trouver le désert ? Pas besoin de parcourir des milliers de kilomètres. Le désert, il est tout proche. Il est déjà en nous. On peut le rejoindre dans le silence, en prenant le temps de ce voyage intérieur qui nous mène jusqu’au cœur de notre être. C’est là que réside celui dont parle Jean, celui « qui vient derrière moi et qui est plus puissant que moi ». Ce voyage au désert, qui nous plonge au plus profond de notre mystère, nous conduira inévitablement vers d’autres déserts, ces désert que vivent toutes les personnes en souffrance, tous les pauvres, et nous en sommes, qui vivent le dénuement, l’aridité du quotidien, la soif de vraies relations d’amour. Pour beaucoup, le désert, c’est le lot de chaque jour.
La voix qui crie dans le désert, nous pouvons l’entendre à tout moment si nous sommes un peu attentifs. Attentif à soi-même, mais aussi attentif à l’autre, attentif aux autres, attentif au Tout Autre, ça ne fait pas de différence. Dans ce cri du prophète dans le désert, nous entendons le cri de Dieu qui désire notre conversion. C’est le cri du malheureux qui appelle au secours du fond de sa détresse, qui appelle lui aussi notre conversion. Et notre conversion ne sera véritable que si elle change à la fois notre regard sur Dieu, sur nous-mêmes et sur les autres. La fréquentation du désert – de tous les déserts, celui que l’on va chercher au fond de soi par la méditation, comme celui qui s’impose parfois à nous ; nos propres déserts comme ceux de nos proches – la fréquentation du désert finira par creuser en nous un désir, une soif. Si le désert ne nous conduit pas au désir, nos désirs ne nous conduiront qu’à un désert.
Mais il ne s’agit pas de rester et de se perdre dans le désert : si Jean-Baptiste baptisait dans l’eau, Celui qu’il annonce, lui, nous baptise dans l’Esprit Saint. Si Jean-Baptiste annonce la venue du Seigneur dans le désert, l’Esprit Saint, lui, nous envoie l’annoncer dans le monde, dans nos lieux de vie, dans notre quotidien, bien loin du désert, jusqu’au milieu de ces foules qui se bousculent dans les rues de nos villes et de nos marchés de Noël. Alors, dans cette période de l’Avent, passons d’abord par la paix et le silence du désert pour entendre cette voix qui crie vers nous, et revenons dans ce monde affairé et bruyant pour lui annoncer la venue de son Sauveur !
Amen !


Daniel BICHET, Diacre permanent.
Clisson et Gétigné, 4 décembre 2011

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