Quelle chance nous avons d’être chrétiens !
Quelle chance, mais en même temps, quelle responsabilité, et parfois, quel fardeau !
Quelle chance, puisque nous avons entendu, à la fin de ce passage d’évangile, Jésus demander à son Père, à propos de ses disciples : « sanctifie-les dans la vérité ». Et comme chrétiens, nous sommes ses disciples, et c’est donc nous que Jésus demande de « sanctifier dans la vérité ». C’est-à-dire qu’il demande à son Père de faire de nous des saints ! Saints, ça veut dire « mis à part », « sortis de l’ordinaire », « différents ». Nous sommes des gens que Dieu choisit de mettre à part. Quelle chance !
Quelle chance, mais il ne faut pas pour autant que ça nous enorgueillisse. Ça ne fait pas de nous des gens meilleurs que les autres, encore moins des gens parfaits. Nous sommes appelés à être des saints, avec ou malgré toutes nos fragilités et nos imperfections. Des saints qui vivons une vie ordinaire, dans notre quartier, dans notre village, parmi les autres, nos proches, nos collègues, nos amis… bref, au milieu du monde, et du monde tel qu’il est. Nous sommes pleinement dans le monde. Mais Jésus nous le rappelle : nous n’appartenons pas au monde, même si nous sommes bel et bien dans le monde. La prière de Jésus à son Père n’est pas destinée à nous désolidariser de nos semblables : « je ne prie pas pour que tu les retires du monde, mais pour que tu les gardes du Mauvais ». Dieu ne nous veut pas hors du monde, mais veut que nous soyons, dans le monde, préservés du Mauvais ; mis à l’écart des puissance du mal, des puissance de mort, pour que nous ayons la vie. Jésus dit aussi dans sa prière : « qu’ils aient en eux ma joie, et qu’ils en soient comblés ». Voilà ce que Dieu souhaite pour nous, qui voulons suivre Jésus.
Quelle chance, donc ! Mais quelle responsabilité ! Être destinés à devenir des saints, être mis à part, ça ne consiste pas à regarder d’en-haut le monde en train de se faire.
Dans la première lecture, nous avons entendu ce passage du livre des Actes des Apôtres où la première communauté chrétienne décide de remplacer Judas par un autre disciple, pour le mettre lui aussi, « à part », avec les onze apôtres. Quelle est la raison de cette décision ? Est-ce pour conserver le nombre douze que Jésus avait choisi ? Est-ce juste le souhait d’effacer la trace de Judas pour mieux l’oublier ? Est-ce simplement pour boucher un trou ? Rien de tout ça. La raison de ce choix, Pierre nous la donne : « Il faut donc que l’un d’entre eux devienne, avec nous, témoin de sa résurrection. » Avec nous ! témoin de la Résurrection !
Si Matthias a été choisi pour être, avec les apôtres, « mis à part », c’est donc pour être, avec eux, témoin de la résurrection de Jésus. Ce n’est pas un titre honorifique, ni une promotion : c’est une responsabilité !
Ce Matthias, inconnu jusqu’alors des lecteurs de l’évangile, n’est pas n’importe qui. Pierre nous apprend qu’il fait partie de ces disciples de la première heure : « il y a des hommes qui nous ont accompagnés durant tout le temps où le Seigneur Jésus a vécu parmi nous, depuis le commencement, lors du baptême donné par Jean, jusqu’au jour où il fut enlevé d’auprès de nous. »
Matthias, un fidèle parmi les fidèles. Même si son nom n’a jamais été mentionné jusqu’alors, nous apprenons ici qu'il était présent dès le début de la vie publique de Jésus, jusqu’à sa crucifixion. Le fait de le mettre « à part » pour qu’il rejoigne les Apôtres n’est pas une sorte de récompense pour sa fidélité, mais plutôt un engagement à aller plus loin. Il était dans ceux qui ont suivi Jésus, le temps est venu pour lui de prendre ses responsabilités : devenir témoin de la Résurrection. Et on sait que dans la langue grecque, parlée majoritairement à l’époque de l’Église naissante, le mot « témoin » se traduit aussi par « martyr ».
Cette responsabilité d’être témoin, nous en sommes les héritiers, nous les chrétiens d’aujourd’hui. Il est de notre responsabilité d’annoncer l’Évangile au monde, à un monde qui n’est pas toujours bien disposé à l’entendre.
Justement, ce dimanche entre Ascension et Pentecôte, l’Église catholique a institué la « journée mondiale des communications sociales ». Elle nous invite à découvrir les médias et supports de communication qu’elle propose, et à prier pour les personnes dont le métier est d’être acteur de cette communication. Pour chacun d’entre-nous, la communication n’est pas forcément un métier, mais en tout cas c’est nécessairement une vocation ! Cette responsabilité d’annoncer l’Évangile au monde est le propre du chrétien, de tout chrétien. « Malheur à moi si je n’annonce pas l’Évangile » disait déjà St Paul dans sa première lettre aux Corinthiens.
Cette « journée mondiale des communications sociales » est pour nous l’occasion de découvrir tout ce que l’Église propose en ce domaine. Les journaux et revues catholiques, les chaines de radio et de télévision, comme Radio Fidélité chez nous, RCF, KTO, et aussi les divers sites internet, les nombreux blogs animés par des chrétiens, sont autant de moyens qui nous sont proposés pour exercer cette responsabilité d’évangélisation. S’il n’est évidemment pas possible pour chacun d’être acteur de ces médias, il est au moins possible d’en être les promoteurs et les contributeurs, financièrement par exemple.
Être chrétien, c’est donc d’abord une chance, mais aussi une responsabilité. C’est parfois également un fardeau.
Saint Pierre, en citant le psaume, le dit bien à propos du vide créé par la désertion de Judas « Qu’un autre prenne sa charge ». Il s’agit bien d’une charge. Nous le savons bien, nous qui parfois aussi sentons combien cette charge peut être pesante. Annoncer l’Évangile, ce n’est pas si évident ! On n’est pas toujours prêt à témoigner, par notre façon de vivre, par nos choix, par nos paroles, de l’amour qui habite en nous et qui nous fait vivre.
Alors, frères et soeurs, puisqu’être chrétien est une chance ; puisqu’être chrétien est une responsabilité ; puisqu’être chrétien est une charge ; et puisque le Père a choisi de nous mettre « à part » à la prière de son Fils, prions-le à notre tour de nous envoyer son Esprit Saint. Avec lui, nous pourrons joyeusement goûter cette chance, exercer sans faiblir notre responsabilité, et porter dans la joie la charge qu’il nous confie.
Amen !
Daniel BICHET, diacre permanent
Gorges, Monnières et Clisson
12 mai 2024