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retour vers l'accueil3° dimanche de Pâques
Ac 3, 13-15. 17-19 ; Ps 4 ; 1 Jn 2, 1-5a ; Lc 24, 35-48
Ils avaient beau voir Jésus, ils ne pouvaient
pas croire que c’était lui. Eux, ses amis, qui vivaient pratiquement
24h sur 24 avec lui, sur les routes de Palestine, ne reconnaissent pas
Jésus. Il faut bien admettre que c’est difficile à croire : Ils l’ont
vu arrêté trois jours plus tôt, ils l’ont vu porter sa croix jusqu’au
Golgotha, ils l’ont vu mourir, ils ont vu sa mise au tombeau... et le
voilà qui leur apparaît, vivant ! Avouons qu’il y a de quoi être
bouleversé d’abord, incrédule ensuite ! Il faut que Jésus leur donne
des preuves pour qu’ils le reconnaissent. Ce n’est pas un esprit ; Un
esprit n’aurait pas eu besoin de manger ce morceau de poisson grillé.
C’est bien un corps, le corps de Jésus ressuscité, qui est là devant
eux ! Un corps de chair et d’os !
Si nous aussi aujourd’hui, deux mille ans
après, nous croyons, c’est parce que ces disciples, à partir de ce
jour-là, ont cru. Ils ont vu, et ils ont cru. Vous allez me dire, pour
eux, c’est facile : ils ont vu, justement ! Mais pour nous ? C’est
beaucoup plus difficile de croire ce qu’on n’a pas vu ! Notre foi, en
effet, n’est pas fondée sur ce que nous avons vu, mais sur la confiance
que nous faisons en ceux qui nous l’ont annoncé. Jésus ne leur
dira-t-il pas, une semaine plus tard : « heureux ceux qui croient sans
avoir vu » ? Eh bien nous, nous croyons sans avoir vu ! Heureux
sommes-nous donc !
Heureux ? Dans le monde d’aujourd’hui,
pourtant, beaucoup considèrent les chrétiens comme des rêveurs ou comme
des naïfs. À l’ère de la technologie omniprésente, des sciences
toutes-puissantes, croire à des histoires aussi invraisemblables que la
résurrection d’un mort, n’est-ce pas de la naïveté, de la crédulité ?
Comment accorder un tel crédit à ces balivernes d’un autre âge ? C’est
ainsi qu’est perçu, pour la grande majorité de nos contemporains, le
message chrétien. Ce ne serait pas dramatique si cette situation
n’était qu’un petit désagrément que nous subissons. Après tout, la
moquerie et la dérision ne sont pas grand-chose comparées aux
persécutions subies par tant de chrétiens de par le monde. Mais cette
image souvent négative de la pensée chrétienne a des répercussions
beaucoup plus importantes sur la société elle-même. A cause de cela,
nos modes de vie évoluent vers un monde où la foi est concurrencée par
la rationalité, où la personne humaine est réduite à un sujet
d’individualisme, où l’opinion personnelle tient lieu de vérité, mais
vérité multiple et équivalente à toutes les autres. Dans ce monde où
les plus forts et les bien portants se permettent par exemple de
décider de la dignité ou non de la vie des autres, c’est la vie
elle-même qui est dévalorisée. Jésus, par sa résurrection, a pourtant
redonné à la vie humaine toute sa dignité, signifiant qu’elle est
appelée à l’éternité, qu’elle est destinée à rejoindre la vie même de
Dieu. Mais l’homme tente de s’octroyer les pouvoirs de Dieu, en se
voulant maître de la vie et de la mort, au tout début de la vie comme à
sa fin.
Dans cette ambiance, les exigences de
l’Evangile paraissent totalement décalées, et sont souvent rejetées.
C’est pourquoi les évêques de France ont rédigé il y a quelques mois
une déclaration intitulée : « Elections : un vote pour quelle société ?
» dont quelques extraits ont été repris dans le dernier bulletin
paroissial. Ce document fait écho au livre du Cardinal André
Vingt-Trois, archevêque de Paris et président de la Conférence des
Evêques de France : « Quelle société voulons-nous ? » dont je vous
recommande vivement la lecture. Parmi les autres initiatives, citons
aussi celle de Mgr di Falco, évêque de Gap et d'Embrun, qui fait
paraître quotidiennement sur le site de son diocèse des éléments-clés
de la Doctrine sociale de l'Eglise, afin d'aider les électeurs dans
leur participation aux prochains scrutins. Les thèmes de cette Doctrine
Sociale de l’Eglise, que certains préfèrent aujourd’hui appeler «
pensée sociale de l’Eglise », constituent ces fameux « points
non-négociables » chers à notre pape Benoît XVI. Et tout chrétien est
appelé à en tenir compte lorsqu’il glissera dans l’urne son bulletin de
vote. C’est aussi sur ce point qu’a insisté notre évêque dans son
homélie lors de la dernière messe chrismale.
Que nous dit donc cette doctrine sociale de
l’Eglise ? Voici les thèmes qu’elle développe : La protection de la vie
à toutes ses étapes ; la reconnaissance et la promotion de la structure
naturelle de la famille ; la protection du droit des parents d’éduquer
leurs enfants ; la protection sociale des mineurs ; la libération des
victimes des formes modernes d’esclavage ; le développement dans le
sens d’une économie qui soit au service de la personne et du bien
commun, dans le respect de la justice sociale, et enfin, la paix. Les
positions de l’Eglise sur ces thèmes ne sont pas des promesses
électorales. Elles sont le fruit de la lecture méditée de l’Evangile,
depuis plusieurs siècles. Elles donnent une vision de l’homme qui soit
le plus conforme à la volonté de Dieu, afin de préparer ici-bas la
venue de son Royaume.
Nous le voyons bien, l’électeur chrétien est
devant un dilemme insoluble, car aucun candidat ne porte à lui seul
toutes ces exigences. L’Evangile n’est pas un programme politique.
Cependant, toute personne qui se réclame de l’Evangile ne peut pas se
contenter de discours individualistes, corporatistes ou populistes.
J’ai entendu par exemple une personne dire : « moi, je voterai pour
celui qui me redonnera ma retraite à 60 ans ». Quelle étroitesse de vue
! même s'il peut sembler légitime de souhaiter la retraite à 60 ans. Ne devons-nous pas, au contraire, élargir notre
vision, prendre de la hauteur, et essayer d’observer, dans chaque
programme électoral, vers quelle société il nous emmène ? Pour nous
chrétiens, les priorités ne sont-elles pas d’aider à faire advenir le
Royaume de Dieu pour tous, dans une société dans laquelle la vie est la
première des valeurs, parce qu’elle nous vient de Dieu ? Une société où
chaque être humain compte, en tant que tel, et non selon son pouvoir
d’achat, son statut social, ou son état de santé ? Une société où le bien commun passe
avant les petits intérêts individuels ? Le vote chrétien n’est pas plus
à gauche qu’à droite. Mais le vote des chrétiens est indispensable.
Nous n’avons pas le droit de laisser les événements se faire sans nous,
sans que nous soyons acteurs, afin de contribuer, chacun à sa place, à
faire advenir le Royaume. C’est ce que Jésus nous demande quand, à la
fin de ce passage de l’évangile que je viens de lire, il dit à ses
disciples en parlant de sa passion, de sa résurrection, de la
conversion de toutes les nations : « c’est vous qui en êtes les témoins
». Il ne nous prend pas à témoins pour que nous restions muets et
inactifs. Un témoin est quelqu’un qui témoigne. Participer à la vie de
la cité en donnant son avis, c’est une forme de témoignage.
Je voudrais terminer par cette parole de
sagesse que nous propose le psaume d’aujourd’hui. Un seul petit verset
qui nous rappelle que, quoi qu’il advienne, le bonheur n’est pas dans
la réalisation des promesses de tel ou tel, mais très simplement, très
humblement, dans la profonde amitié avec Dieu :
« Beaucoup demandent :
« Qui nous fera voir le bonheur ? »
« Sur nous, Seigneur, que s'illumine ton visage !
Amen !
Daniel BICHET, diacre permanent.
Clisson et Gétigné, le 22 avril 2012
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