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retour vers l'accueil3° dimanche de Carême
« Détruisez ce sanctuaire, et en trois jours je le relèverai » (Jn 2, 13-25)
Frères et sœurs,
Rebâtir un temple en 3 jours alors qu’il a fallu 46 ans pour le
construire est un cauchemar pour les architectes, vous en conviendrez !
Une folie pour tous ceux qui entouraient Jésus ce jour là à Jérusalem.
Oui, j’ai vraiment de la compassion pour eux, devant des propos si
incompréhensibles, si mystérieux, si incroyables !
Cela me fait penser à ce pauvre Numérobis, le meilleur architecte
d’Alexandrie, dans la série d’Asterix, qui à l’aide de potion magique
(il faut le dire quand même !) tient le délai imposé par Cléopâtre pour
construire un palais pour César. Performance ô combien farfelue et
utopique ! Pour couronner ce succès, Cléopâtre le couvrira d’or (au
sens propre comme au sens figuré !) Voilà pour la petite histoire, pas
vraiment dans le sens de l’évangile de ce dimanche …
Pour nous aujourd’hui, la réponse à l’énigme de Jésus est dans
l’extrait même de l’évangile. Nous n’avons donc aucun mérite de
compréhension ou d’intelligence particulière. Même si rien n’est
impossible à Dieu, la corrélation entre le temple de Jérusalem et le
corps du Christ ne paraît pas si évidente pour le commun des mortels,
encore moins pour Israël au temps de Jésus …
« Le Temple de Jérusalem est chargé d'une grande signification
symbolique. Comme la tente de réunion qui l'a précédé au cours de
l'Exode, il est le lieu de la rencontre divine », nous fait savoir le
père jésuite Marcel Domergue … Le Temple de Jérusalem est le signe de
la volonté de Dieu, d'habiter l'humanité. Et si Jésus purifie le Temple
de son usage purement commercial (du culte de l’argent), c'est
précisément, parce que c’est le Temple lui-même qui va changer de
nature. Jésus signifie par-là que le lieu où l'on pourra désormais
rencontrer Dieu est son propre corps. Le mot Temple change ainsi de
sens. Ce corps – ce Temple donc – les hommes le détruiront, mais il
ressuscitera le 3ème jour. Prophétie pour le moins évidente et vous
l’avez compris, frères et sœurs, de l'événement pascal, mais qui ne
pourra être comprise… qu'à la lumière de la résurrection.
Le Corps du Christ ressuscité remplit l'univers. Il est partout. Nous
n'adorons Dieu « ni sur une montagne, ni à Jérusalem, ni ailleurs »,
mais « en Esprit et en Vérité » comme nous le dit saint Jean (Jean 4,
21 et 23). Cela signifie qu'il n'y a pas de lieu privilégié, parce que
tous les lieux deviennent « privilégiés ». Le Christ est là, au milieu
de nous, dès que nous nous ouvrons à nos prochains, à l’amour, à la
miséricorde, à la bienveillance. Nous devons alors comprendre que le
Corps du Christ ressuscité n'en est pas moins pluriel : en quelque
sorte, il intègre tous les croyants.
Ce Corps du Christ ressuscité prend pour nom Église, non pas au sens
hiérarchique du terme, mais d'assemblée en communion. Devenus ensemble
corps du Christ, nous sommes désormais le Temple de Dieu. St Paul l’a
bien compris lorsqu’il proclame que « c'est dans le Christ Jésus
lui-même que tout l'édifice se lie pour former un Temple saint… »
(Éphésiens 2,21), une demeure dont Jésus en est la pierre
fondamentale, la pierre d’angle.
A travers ce Temple saint, nous faisons tous, frères et sœurs,
l’expérience de la présence de Dieu et de son Esprit-Saint dans nos
vies. Nous ne croyons pas en une force, ou en une énergie, mais en
quelqu’un qui s’adresse personnellement à chacun de nous, à travers les
événements de nos vies, dans nos expériences intérieures. Dieu est
souvent symbolisé par la lumière. Comme le soleil, qu’on ne peut pas
regarder de face, au risque de nous brûler les yeux, mais qui éclaire
ce qui nous entoure, Dieu, que nous ne voyons pas, éclaire notre
existence en nous donnant des « signes » de sa présence.
La façon dont Dieu parle à nos âmes nous dépasse, nous ne pouvons la
comprendre tout à fait. En effet, notre alphabet n’est pas l’alphabet
de Dieu et nos mots ne sont pas ses mots. Lorsque Dieu parle, il n’a
pas besoin de faire vibrer les cordes vocales et nous ne l’entendons
pas avec nos oreilles, mais grâce au point le plus caché et mystérieux
de notre être, que nous appelons tantôt cœur, tantôt conscience.
Frères et sœurs, pour aller plus loin dans la compréhension de
l’évangile, lorsque saint Paul écrit dans une de ses lettres : “vous
êtes le temple du Christ, vous êtes le temple de Dieu”, il nous invite
par là à chasser de ce temple tout ce qui nous éloigne de Dieu. Les
marchands que Jésus dénonce, c’est chacun de nous quand nous sommes
encombrés par le pêché. Ce n’est qu’en faisant le ménage en nous, que
nous pourrons retrouver Dieu. C’est absolument nécessaire si nous
voulons accueillir dignement le Christ ressuscité.
L’Évangile nous apprend que Jésus ressuscité est désormais le seul
chemin vers Dieu, le seul temple où l’on peut rencontrer Dieu. Et ce
nouveau Temple est universel, il est partout présent, même dans notre
quotidien le plus élémentaire.
« Je crois en Dieu, je vais à la messe le dimanche, j'essaie de lire
les Évangiles, je prie seul et en famille… mais je suis bien incapable
de lire les signes de Dieu dans ma vie », confie Pierre, 38 ans, père
de trois enfants. Sa femme, Isabelle, sourit en écoutant son époux : «
Comme Pierre, je ne suis pas très lucide sur le sujet. Lorsque, dans
notre équipe Notre Dame, arrive notre tour de dire ce que nous avons
vécu d'important depuis notre dernière rencontre, nous sommes le plus
souvent bien incapables de lire les événements du point de vue de Dieu.
À l'inverse, nous avons un couple d'amis pour qui tout a un sens : une
rencontre dans le métro, un coup de téléphone, un retard dans un
rendez-vous important… ils voient et entendent Dieu leur parler à tout
moment », ajoute-t-elle.
Comme Pierre et Isabelle, nombreux sont ceux qui appréhendent le sujet
avec difficulté. Mais nombreux aussi les chrétiens qui disent voir le
Christ agir quotidiennement dans leur vie. À première vue, ces derniers
ont raison. En effet, Dieu parle, mais il ne le fait pas n'importe
comment.
Dieu peut nous parler dans nos vies à travers des événements, des
rencontres, et des signes. C’est ce que nous croyons. La difficulté,
frères et sœurs, est de savoir faire la part des choses entre ce qui
vient de lui et ce qui vient de nous. Attention à ne pas confondre
notre désir immédiat avec ce que Dieu veut pour nous. C'est le piège
des pièges, comme l'avait si bien noté saint Ignace de Loyola.
Dieu n'est donc pas silencieux et il faut savoir l'écouter. Pour cela,
il faut se rendre disponible, mais deux attitudes nous en empêchent. La
première consiste à s'enfermer exclusivement dans la rationalité, une
armature que l'on se crée et qui durcit notre cœur. Et à l'inverse,
celle consistant à plonger dans l'irrationalité la plus totale, en
cherchant à tout instant des manifestations dans notre vie. La bonne
attitude est d'accueillir les signes de Dieu à travers notre
affectivité, nos sens et de les approfondir par notre intelligence …
Pour entendre Dieu nous parler, frères et sœurs, il faut le connaître,
être familier de la Bible, des Évangiles … sa Parole nous met en
sécurité … elle est libératrice, elle nous console !
Comme dans le livre de l’Exode (que nous venons d’écouter), Dieu ne
veut que le salut de tous, il ne veut que nous libérer de l’esclavage …
il nous invite au discernement, à la sagesse, à baliser le chemin
emprunté pour aller de l’avant, pour éviter les pièges que nous tend le
malin. Il ouvre nos esprits à l’intelligence de sa loi … Il nous
enseigne comment il faut vivre pour rester dans l’alliance et
accueillir sa bénédiction.
Et si nous voulons accueillir dignement le Christ ressuscité, mes
frères et mes sœurs, c’est vers la croix que nous devons regarder. Le
vrai Dieu se révèle là où les hommes ne voient que folie et scandale ;
alors que le signe de la croix se présente comme la seule attestation
d’un Dieu dont le nom est “miséricorde”.
Amen.
Patrick CHAHLA, diacre permanent
St Lumine et Clisson, le 7 mars 2021
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