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2° dimanche de Pâques


Jn 20,19-31

« Huit jours plus tard, Jésus vient »


Frères et sœurs,

Je me suis amusé à retracer, sur cartographie, le parcours supposé qu’aurait emprunté saint Thomas depuis Jérusalem jusqu’en Inde, plus précisément jusqu’à la basilique St Thomas de Chennai (où se trouve son tombeau), en bord de mer, sur le golfe du Bengale …

6542 km séparent Jérusalem de Chennai … en passant par la Syrie, l’Irak, l’Iran, le Pakistan et l’Inde en diagonale du Nord au Sud. On peut alors se poser la question de la motivation profonde de Thomas, jeune juif de Galilée, que rien ne prédestinait à faire une si long et périlleux voyage. Pour l’histoire, la tradition le présente comme un envoyé et à ce titre, il aurait porté la « bonne nouvelle » jusqu'en Inde du Sud en l’an 52 et y serait mort, martyr, aux environs des années 70, sur la colline qui s'appelle encore aujourd'hui mont Saint-Thomas de Chennai.

Thomas est l'un des Douze comme le précise saint Jean. Le même Jean qui nous rapporte plusieurs interventions de Thomas et qui nous révèlent son caractère. Lorsque Jésus s'apprête à partir pour Béthanie au moment de la mort de Lazare, il y a danger et les disciples le lui rappellent : « Rabbi, tout récemment les Juifs cherchaient à te lapider ». C’est précisément Thomas qui se révèle être le plus courageux, lorsqu’il entraîne les apôtres à la suite de Jésus, avec fidélité et engagement total : « Allons-y, nous aussi, mourir avec lui. » De cette parole est préfiguré, frères et sœurs, le martyre futur de celui qui, dès le début a donné sa vie à Jésus.

Et lors du dernier repas, lorsque Jésus annonce son départ, c'est encore Thomas, qui dit à haute voix ce que les autres pensent tout bas : « Seigneur, nous ne savons même pas où tu vas ; comment pourrions-nous savoir le chemin ? ». Il a le courage d’avouer son ignorance, et il demande à Jésus de l’éclairer. N’est-il pas déjà à ce moment-là, le modèle du croyant qui demande dans sa prière à Jésus, d’être éclairé ?

C’est face à ses questions et ses doutes, que Thomas doit sa célébrité. Ainsi, quand les autres disciples lui disent : « Nous avons vu le Seigneur ! », il ne veut pas les croire : « Si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous et ma main dans son côté, non, je ne croirai pas ! »
Pour la postérité, il a ainsi reçu le qualificatif d'incrédule. Mais on oublie souvent que Thomas est surtout le premier qui, devant le mystère des plaies du Christ ressuscité, a donné à Jésus son véritable titre : « Mon Seigneur et Mon Dieu. »

De ces plaies, il va recevoir la grâce d’un zèle apostolique extraordinaire. Plusieurs Églises tiennent Thomas pour leur fondateur : l’Église chaldéenne, l’Église assyrienne, et toutes les Églises indiennes. Il a été « l’athlète du christ », celui qui, toute sa vie, a porté au loin la Bonne nouvelle. Et en ces temps difficiles, il demeure pour nous un modèle de foi et d’espérance.

Frères et sœurs,

S’il est vrai que Jésus a corrigé Thomas : « Cesse d’être incrédule », il lui a surtout donné une béatitude : « Heureux celui qui croit sans avoir vu ». C’est pour nous, une invitation à aller de l’avant. Jésus nous invite à ouvrir nos portes closes, celles qui nous séparent des chemins où il compte envoyer ses disciples, nous envoyer, avec la force de l’Esprit-Saint.

Car pour ainsi dire, notre situation d’aujourd’hui n’est pas si différente de celle des apôtres, au lendemain de la mort de Jésus. Ils se sont enfermés par crainte de l’extérieur menaçant. Ils se sont aussi enfermés, prisonniers de leurs culpabilités, d’avoir tous abandonné et trahi le Seigneur … Nous avons tous ce genre de portes closes, frères et sœurs, à l’entrée de nos âmes : pour se protéger de l’extérieur, rien de tel que de rester à l’intérieur ; pour éviter le regard perçant du remord, rien de tel que de fuir le regard d’autrui ; pour affronter la peur de l’extérieur, rien de tel que la sécurité que procure l’intérieur.

Mais voilà que l’évangile nous présente Jésus qui « vient » et qui « est là au milieu de ses disciples » … au milieu de nous ! Malgré les difficultés et les obstacles, malgré les précautions et les barrières que nous dressons entre le monde et nous, entre nos frères et nous, entre Dieu et nous-mêmes, Jésus entre. Et le don de sa paix rend dérisoires les petites sécurités que nous nous ménageons à grande peine. Il n’est plus question de penser aux menaces extérieures, supposées ou réelles. Il n’est plus question de se terrer dans nos peurs ou de sombrer dans la désespérance.

Bienheureux sommes-nous, frères et sœurs, si nous avons le désir de croire en la vie plus forte que la mort, d’espérer en l’amour plus certain que le péché, d’accueillir la miséricorde au plus intime de nos refus et de nos peurs. Les récits d’apparition du Ressuscité montrent que la foi est un chemin, un passage progressif du doute à la confiance.
Bienheureux sommes-nous, qui croyons sans voir. Lorsque Jésus ressuscité rejoint ses disciples apeurés et tourmentés, il aurait pu leur faire des reproches de l’avoir abandonné, trahi, renié … de manquer de foi … Or c’est la paix qu’il leur apporte, sa paix. Et cette paix, c’est le pardon, c’est la réconciliation. Avec Jésus ressuscité, le mal n’a pas le dernier mot, c’est la confiance et la miséricorde qui triomphent.

Jésus ressuscité confie ainsi à ses disciples (à nous tous aujourd’hui !), la mission d'être les ministres de la miséricorde divine, un don qui naît des blessures de son côté transpercé.

Il nous faut alors, frères et sœurs, bien écouter ces mots que Jésus nous adresse (c’est dans l’évangile de ce dimanche) : « La paix soit avec vous ! et « Recevez l’Esprit Saint ». C’est dans ces mots qu’il nous faut puiser la force de rester des disciples actifs de la miséricorde divine, présents à nos proches, à ceux qui sont démunis ou blessés par la vie. C’est dans ces mots et par ces mots que nous sommes faits … témoins, disciples et missionnaires.

La grâce de la résurrection vient faire tomber les barrières psychologiques que nous érigeons pour nous protéger et qui nous éloignent des autres. La grâce de la résurrection vient nous libérer de l’enfermement dans lequel nous sommes, pour trouver le zèle de nous projeter, (à l’exemple de St Thomas) … certes pas forcément aussi loin, mais dans la rencontre de ceux qui sont dans les cercles de nos vies. C’est là que le Seigneur nous envoie, tout près de nous, pour témoigner de la joie de la résurrection dans nos vies.

En ce jour, où Jésus a promis à Sainte Faustine que ceux qui imploreraient sa Divine Miséricorde recevraient beaucoup de grâces, demandons au Seigneur de nous rendre disponibles à la force de la foi. Qu’il soit avec nous, pour que nous soyons audacieux dans le témoignage. Qu’il nous garde plus généreux dans la pratique de la charité fraternelle, qu’il nous libère de toutes les angoisses qui nous obsèdent et nous donner courage pour que se réalisent dans nos vies ordinaires, de vraies merveilles.

La foi, la confiance en Dieu, frères et sœurs, est un bonheur, un don à demander humblement au Seigneur, tous les jours : « Augmente en nous la foi ! ».
Sainte Faustine à qui Jésus a révélé la fontaine de miséricorde qui jaillit de son cœur blessé, aimait dire et redire cette prière : « Jésus, j'ai confiance en Toi ! »

Faisons nôtre cette prière qui exprime l'attitude avec laquelle, nous voulons, nous aussi, nous abandonner avec confiance entre les mains miséricordieuses de Jésus notre unique Sauveur, car il n'y a pas de foi plus profonde, d'espérance plus vivante et d'amour plus ardent que la foi, l'espérance et l'amour de celui qui, dans les difficultés, se remet entre les mains sûres du Seigneur…

Oui Jésus, j'ai vraiment confiance en Toi !
Ainsi soit-il !


Patrick CHAHLA, diacre permanent
le 11 avril 2021


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