En ce deuxième dimanche de Carême, la
liturgie nous propose de méditer sur le sacrifice d’Isaac, le fils
d’Abraham
(Gen 22,1-2,9-13,15-18) et sur la Transfiguration de notre Seigneur
Jésus-Christ selon saint Marc (Mc 9,2-10).
Dans le récit de la Genèse, Abraham, le
père du peuple de Dieu, fut
mis à l’épreuve par le Seigneur “ prends
ton enfant, ton unique, celui que tu aimes, Isaac... tu l’offriras en
sacrifice
sur la montagne que je t’indiquerai. “
Cette demande est surprenante de la
part du Seigneur même si à l’époque le sacrifice d’enfant n’était pas
rare. Il
interpelle ici la foi de son serviteur et le contexte est compliqué.
Mais enfin, sacrifier Isaac, le fils de
la promesse que Dieu fit à Abraham alors qu’il avait 99 ans et que Sara,
son
épouse, avait dépassé depuis longtemps l’âge d’enfanter puisqu’elle
avait 90 ans.
Et cette promesse était grandiose « j’établirai mon alliance avec
toi et
je multiplierai ta descendance à l’infini » (Gn 17,2).
Et les deux époux vont rire d’où le
prénom d’Isaac qui signifie “que Dieu rie “ou l’enfant du
rire.
Abraham obéit dans la foi, il monte sur
la montagne et prépare son enfant pour le sacrifice.
Il
est dans un abandon complet à la volonté de Dieu que nous pères de
famille des
temps actuels n’aurions sans doute pas pu envisager tant les cultures
ont
changé.
Redisons-le, ce récit biblique montre
combien le statut de l’enfant à cette époque pouvait être fragile, le
sacrifice
d’enfants étaient fréquents en ces temps reculés où les rites païens
étaient
nombreux.
Abraham ne va donc pas défaillir et se
saisir du couteau, alors il faut que l’ange du Seigneur l’appelle et
l’interpelle « Abraham, Abraham », qui répond « me
voici »
en lui disant « ne porte pas la main sur le garçon, ne lui fait
aucun mal,
je sais maintenant que tu crains Dieu »
Et le Seigneur va renouveler sa
promesse de lui donner une descendance aussi nombreuse que les étoiles
du ciel et
le sable au bord de la mer et que cette descendance sera
bénie.
Ce que nous pouvons retenir pour nous
en ce temps qui nous conduit au vendredi saint, à la crucifixion du
Christ, c’est
que Dieu, Père lui-même a permis que le sacrifice de son propre fils
aille
jusqu'à la mort et la mort sur une croix, contrairement au sacrifice
d’Isaac et
que le fruit de ce sacrifice nous en vivons aujourd’hui avec une
multitude de
frères et sœurs.
Dans le récit de la Transfiguration de
Notre Seigneur, Jésus, l’évangeliste Marc nous montre la toute puissance
d’un
Dieu qui s’auto-révèle dans toute sa splendeur devant Pierre, le premier
des frères
qui dans l’Eglise présidera à la charité, Jacques, le premier Apôtre
martyr à Jérusalem
et Jean, qui recevra Marie
comme mère au
pied de la Croix..
Cela se déroule sur la Montagne, le
Mont Thabor, car la montagne dans l’Evangile, plus largement dans la
Bible, est
le lieu privilégié de la révélation. Comme si l’on se disait : il
faut
prendre du recul (à l’écart, nous dit l’évangile) et de la hauteur (sur
une
haute montagne) car quelque chose d’important va se passer.
Invitation (et peut-être rappel) bien
venue pour nous après dix jours de Carême de savoir prendre du recul et
de la
hauteur.
« Il fut transfiguré devant eux ».
Pour Jésus c’est apparaître dans sa gloire et ainsi les apôtres vont le
voir
dans sa gloire, nous dit saint Luc dans sa relation de cette
transfiguration.
Pour un être humain on dit de quelqu’un
qu’il est transfiguré quand apparaissent sur son visage toute la beauté
intérieure de la personne.
Dimanche dernier, à la Cathédrale, il
fallait voir les visages de nos catéchumènes après leur appel décisif à
recevoir le baptême dans la nuit de Pâques. Leur joie intérieure
rayonnait.
Si nous revenons au récit évangélique,
Moise le libérateur, celui qui a transmis la Loi et Elie, le prophète de
l’Horeb, apparaissent au coté de Jésus. Ce sont deux grandes figures
bibliques
qui ont marqué l’histoire du Peuple de Dieu.Leur Histoire est notre
histoire et
Jésus lui-même ne se comprend que comme celui qui vient accomplir ce que
tous
les Prophètes ont annoncé.
Dans cet épisode de la Transfiguration
rapportée par St Marc c’est l’apôtre Pierre qui prend la parole, Jésus
ne dit rien,
c’est sa présence qui parle, qui nous dit tout. Pierre
pensant, malgré sa frayeur, faire œuvre
utile, fait la proposition de dresser trois tentes, comme celle de la
présence
de Dieu qui accompagné les Hébreux dans le désert.
Et puis c’est l’apothéose de l’événement,
Dans la nuée la voix du Père se fait entendre, comme au baptême de Jésus
par
Jean dans le Jourdain, « Celui-ci est mon fils bien-aimé,
écoutez-le ».
Nous le savons, la nuée dans la Bible est le signe de la présence de
Dieu.
« Écoutez-le » voilà
l’invitation que nous lance notre Père, écoutez ce Fils que je vous
envoie pour
racheter le péché du monde et qui prépare la venue de l’Esprit-Saint,
l’Amour
qui nous lie et qui vous restera présent pour toujours.
Le Seigneur en redescendant ordonne à
ses apôtres de ne rien dire. On peut penser que seule la Résurrection du
Christ
leur permettra de dévoiler plus tard ce qu’ils ont réellement vécu.
Pierre,
plus tard, affirmera « nous avons été témoins oculaires de sa
majesté »
(2P 1,16)
En ce temps de Carême, tournons notre
regard vers le visage radieux du Fils de Dieu pour en être illuminés.
Demandons
à Dieu par l’intercession de la Vierge Marie, Maitre de foi et de
contemplation,
de pouvoir accueillir en nous la lumière qui brille sur le visage du
Christ,
afin d’en refléter l’image sur ceux qui s’approchent de nous. (cf. St
Jean-Paul
II -06 /08 /2000).
Georges
RENOUX,
diacre permanent
Basilique
du
Sacré Cœur, Marseille
Le
25
février 2024