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Mc 9, 38-43.45.47-48

110ème Journée Mondiale du Migrant et du Réfugié

Je me souviens d’un chirurgien, bénévole dans un centre d’accueil santé pour personnes à la rue, qui disait de ce texte d’Evangile qu’il devrait être considéré comme un texte publicitaire pour son travail. En effet, que d’invitations à l’amputation dans ce texte ! Et on coupe la main, et on coupe le pied, et on arrache l’œil… Jésus nous donne l’impression d’être le chantre du scalpel ! Et pour couronner le tout, il propose de jeter à la mer, une meule autour du cou, celui qui est cause de scandale. Sur le coup, on peut se l’avouer, on a un peu du mal à reconnaître le Jésus non violent, miséricordieux, doux et humble de cœur que l’on connait ! Mais la Parole du Christ a pour but de nous faire connaître le projet de Dieu pour notre humanité, son invitation à nous mettre en marche à sa suite pour faire advenir le Royaume en notre Monde. Et, comme toujours, pour bien la comprendre, il nous faut aller un peu au-delà des lignes. Et s’il est bien question d’un Dieu chirurgien dans ce texte, il y est moins question d’un chirurgien qui coupe, que d’un médecin qui ne souhaite que réparer, nous réparer.

Regardons ensemble dans ces 3 textes du jour, ce que Dieu veut vraiment pour l’Homme qu’il a créé et ce qu’il veut vraiment que nous soyons, pour être, autant que possible, à son image.

Le texte de la 1ère lecture nous parle du temps où le Peuple de Dieu, à peine sorti de l’esclavage, fuyant une terre et un régime qui l’a mis sous oppression, chemine à travers le désert. Un chemin d’espoir, de rêve d’une vie meilleure, mais aussi une route longue et dangereuse, semée de doutes, de pièges mortels, tant pour le corps (les serpents, les ennemis…) que pour l’âme. Rappelons-nous par exemple l’épisode du veau d’or, la tentation de l’idolâtrie. Une longue migration qui voit, à de nombreuses reprises, ce peuple à la nuque raide, comme le dit l’Ecriture, récriminer contre son Dieu, et, à de multiples occasions, tenter de s’en détourner. Et qu’y voyons-nous au final ? Un Dieu qui finit par se lasser ? Qui, de guerre lasse, laisse tomber ceux qu’il a choisi de sauver ? Non. Au contraire. Un Dieu de patience, un Dieu de miséricorde, un Dieu d’Amour, qui vient parler à son Peuple par l’entremise de Moïse et qui s’efforce de mettre son Esprit sur ceux qui pourraient diffuser sa Parole. Un Dieu de confiance, qui sait qu’il ne sauvera pas l’Homme tout seul, comme un magicien, mais qui espère mettre en l’Homme la force de son Esprit.  Cette force pour que celui-ci devienne prophète, c’est-à-dire annonciateur de ce qui est bon et juste, aux yeux du Seigneur, pour accéder à la terre promise, au Salut de la vie éternelle.

Le texte de la 2ème lecture, assez dur lui aussi, nous invite à nous questionner sur ce qui, dans nos vies, est vraiment important pour ceux qui désirent cheminer à la suite du Christ. On pourrait croire, là aussi, en lisant un peu rapidement ce qu’écrit Saint Jacques, et qui reprend des paroles de Jésus à ce sujet, que Dieu condamne ceux qui s’enrichissent. Mais le texte en réalité condamne moins l’opulence qu’il n’invite à la générosité. Ce que notre Père nous propose, c’est d’aimer, plus que d’amasser. De donner, plus que de nous détourner. Si nous ne privons pas ceux qui ont besoin de notre bienveillance, de notre fraternité, de notre charité, au sens Evangélique du terme qui signifie « partage de l’Amour », alors nous pouvons dire que nous marchons à sa suite. Mais si nous fermons nos yeux, nos cœurs et nos mains face à la misère, à la détresse, alors, en effet, pleurs et lamentations nous guettent.

Et puis, ce texte de l’Evangile. Il commence par évoquer une scène un peu surprenante. Un des douze, et pas le moindre, car il s’agit de Jean, vient dénoncer auprès de Jésus un Homme qui fait le Bien, mais qui ne fait pas partie du club. La réponse de Jésus est très claire. Ce qui compte, ce n’est pas l’appartenance, l’étiquette, l’identité. Ce qui importe, c’est l’acte, la mise en œuvre, la pratique de ce à quoi Dieu nous invite, peu importe qui nous sommes, d’où nous venons. Pour être un prophète de Dieu, pour être pour lui, et non contre lui, comme le dit Jésus, il ne suffit pas de s’auto-déclarer « bon chrétien ». Mais, il s’agit, par ce que l’on est pour les autres, par ce que l’on s’efforce de faire pour, et surtout, avec les autres, de croire en la Parole de Dieu, en la mettant en pratique. C’est un long chemin, une marche périlleuse. La chute nous guette et nous menace à tout instant. Et nous pouvons, nous aussi, en agissant à rebours du message de l’Evangile, être une cause de scandale, de chute pour les petits qui croient et espèrent en l’Amour du Père, en attendant celui de leurs frères. Et alors, nous pouvons en effet, nous voir menacé de meule autour du cou, de l’amputation, de la géhenne. Notre Eglise, notre pauvre Eglise, en a malheureusement tant d’exemples, et encore tout à fait récemment, de chrétiens ayant fait des choses admirables d’une part, et ayant commis l’abominable d’autre part. Cela doit nous inviter à beaucoup, beaucoup d’humilité.

En ce dimanche, où notre Eglise célèbre la 110ème journée mondiale du migrant et du réfugié, notre Pape François a voulu lui donner pour thème cette affirmation que nous voyons au travers des textes de l’Ecriture : « Dieu marche avec son peuple ». Dieu marche avec son Peuple et il nous invite à le suivre. Mais, nous rappelle le Pape, « Dieu ne marche pas seulement avec son peuple, mais aussi dans son peuple, en ce sens qu’il s’identifie aux hommes et aux femmes qui cheminent dans l’histoire – en particulier aux derniers, aux pauvres, aux marginalisés, aux migrants et aux réfugiés – comme s’il prolongeait le mystère de l’Incarnation ». Dieu, en nous offrant son Esprit Saint, en le posant sur nous, en nous, comme il l’a fait pour les 70 anciens du temps de Moïse, attend de nous que nous devenions prophète de son Amour, artisan de sa miséricorde, acteur de sa charité. Que nous osions accepter de partager nos richesses, plutôt que de vouloir les protéger pour en profiter égoïstement, et risquer de les voir pourrir, comme l’écrit St Jacques. Et que nous acceptions, en lien avec ceux qui croient différemment de nous, de donner le trésor d’un verre d’eau à celui qui appartient au Christ, c’est-à-dire à chacun de ces petits qui sont aimés du Père.

Alors puisse notre cœur de chrétien être touché par ce message du Pape à l’occasion de cette journée mondiale du migrant et du réfugié. Puisse notre Foi nous mettre nous aussi en marche à la suite de Jésus et avec le Père. En marche sur cette longue route de l’exode, pour fuir la tentation du repli sur soi, qui mène à l’amputation de ce qui peut nous rendre Saint. Et prions, pour que nos pas nous fassent avancer sur ce chemin de l’Amour inconditionnel d’un Dieu qui, en toute chose, en chaque instant, marche avec son Peuple. Marche avec nous tous, avec chacun de nous.



Olivier RABILLOUD, diacre permanent.

Paroisse St Vincent de Paul, Rezé (44)

29 septembre 2024                                                                                                    


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