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Ce
passage d’Evangile que nous venons d’entendre ne cherche sûrement pas à
mettre en valeur le comportement des disciples de Jésus. Sur la route
menant à Jérusalem, Jésus les instruit en leur annonçant sa passion, sa
mort et sa résurrection. Il révèle clairement l’intention de ses
adversaires de le faire disparaître : « Le Fils de
l’homme est livré aux mains des hommes ; ils le tueront, mais
trois jours après il ressuscitera » C’est pourtant, dans
l’évangile selon St Marc, la troisième fois que Jésus leur annonce sa
passion mais ils ne comprennent toujours pas ou ont peur de trop bien
comprendre et préfèrent ne pas interroger Jésus ! Pour eux, puisque
Jésus est bien le Messie, ils préfèrent l’envisager comme un personnage
royal qui libèrera Israël de l’occupant romain et ils s’attribuent déjà
des places de choix dans ce royaume.
« Sur la route, ils
avaient discuté entre eux pour savoir qui était le plus grand. »
On peut être tentés de les critiquer, mais leur attitude s’explique
aisément. Le pouvoir, sous toutes ses formes, exerce depuis toujours
sur les hommes une réelle fascination, tant sur ceux qui le possèdent
que sur ceux qui ne le possèdent pas et le désirent. Et,
reconnaissons-le humblement : vingt siècles après, même dans les
pays comme le nôtre, marqués par la culture chrétienne, la situation
n’a pas vraiment changé. Le critère de la réussite, dans notre société,
c’est la première place, les honneurs, la réussite matérielle, la
considération. Depuis notre premier jour à l'école, comme dans notre
vie professionnelle, politique ou sociale, c'est ainsi qu'on juge le
premier. Et c'est vrai aussi bien sur le plan international que sur le
plan individuel. La première nation, c'est la plus forte,
économiquement, militairement, financièrement. Ce sont alors les plus
petits et les plus faibles qui en portent les conséquences. Pensons à
la guerre économique que se livrent les grandes puissances, que se
livrent les multinationales. La volonté de dominer le marché, de
contrôler l’économie, tout cela empoisonne la vie de l’humanité. Tout
cela fait chaque jour un nombre incalculable de victimes, aussi bien
dans nos pays développés que dans les pays en voie de développement.
L’actualité de ces derniers jours attire notre attention sur le nombre
croissant de salariés acculés au suicide parce qu’ils se sentent
incompris voire rejetés par leur entreprise. L’apôtre Jacques, dans la
seconde lecture, en des termes très directs, dévoile la racine des
guerres, des conflits, des meurtres, de toute violence. Il s’agit
toujours, à travers la jalousie, les rivalités, de la soif de pouvoir
qui est en l’homme. Cette âpre compétition qui règne aujourd’hui comme
hier, c’est la règle de notre humanité : elle fait des millions de
victimes.
Nous pouvons et nous devons nous insurger et dénoncer une
telle situation, mais comprenons bien : Tout cela ne concerne pas que
les autres. Il y a aussi en chacun de nous cette tentation de se mettre
en avant et d’imposer nos idées aux autres.. Alors oui, nous avons
besoin de nous laisser instruire par l’Evangile, nous avons toujours à
nous ajuster au regard et au projet du Christ. Prenons le temps
d’accueillir avec un cœur ouvert l’annonce qu’il nous fait.
"Si
quelqu'un veut être le premier, qu’il soit le dernier de tous et le
serviteur de tous". Cette invitation de Jésus fait partie de ces
paradoxes bien connus de l'évangile : les premiers seront les derniers
et les derniers premiers... qui veut trouver sa vie doit la perdre...
qui s'élèvera sera abaissé, qui s'abaissera sera élevé. Ils indiquent
un chemin à poursuivre et une manière de vivre à partir de ce mot
« serviteur » qui résume, à condition de bien le comprendre,
notre vocation humaine et chrétienne. En préparant cette homélie, j’ai
pensé pouvoir vous éclairer en cherchant sur internet des synonymes de
ce mot. J’ai été déçu car voici les six mots que j’ai trouvés : boy,
domestique, esclave, larbin, suppôt, valet…
Ceci n’a rien à voir
avec le message de Jésus. Si Jésus est venu lui-même pour servir et
donner sa vie ce n’est pas pour cautionner une organisation
sociale qui tendrait à l’exploitation de l’homme par l’homme. Jésus,
doux et humble de cœur, s’est fait « serviteur » par amour et
est allé jusqu’à donner librement sa vie pour tous les hommes. Jésus ne
nous demande pas d’être des « larbins » mais il nous invite à
marcher humblement à sa suite dans le service de nos frères et surtout
des plus petits, des plus faibles, à nous engager pour ce service de
l’amour. L'abbé Pierre, dans une de ses prédications, disait qu'il
avait beaucoup réfléchi à la question de nombreux étudiants lui
demandant que faire pour lutter contre la pauvreté: « Devenez le
plus compétent possible, leur disait-il, pour pouvoir mettre au service
des pauvres vos compétences. »
Un geste en dit parfois plus
que des paroles. Pour se faire comprendre, Jésus place un enfant au
milieu d’eux. Après l’avoir embrassé, il leur dit : "Celui qui
accueille en mon nom un enfant comme celui-là m'accueille moi-même." Or
dans le monde biblique, l'enfant est symbole de faiblesse. C'est
l'exclu qui n'a pas le droit de prendre part à la conversation des
grands. Quand Jésus prend un enfant dans ses bras et demande de
l’accueillir, il veut faire passer un message important : Il nous
demande d'accueillir et de promouvoir tout ce qui ne compte pas aux
yeux de la société, tout ce qui est quantité négligeable, tout ce qui
est marginalisé.
Aujourd'hui, nous pouvons nous poser quelques
questions : « Qu’est-ce qui a motivé mes actions cette semaine ?
Est-ce le service des autres ou, comme dit saint Jacques, « la
convoitise » c’est à dire la volonté de puissance sous toutes ses
formes, la volonté de dominer, de posséder ? » Une société se juge
sur la manière dont les petits sont accueillis et reconnus. Pas
seulement les enfants mais aussi les immigrés, les personnes
handicapées, les malades, les vieillards, tout ce qui compte si peu. Ce
qui fait la valeur d’une vie, ce ne sont pas les grandes choses mais
c’est l’amour de tous les jours pour tous ceux qui nous entourent, en
particulier pour les petits.
Au cours de cette eucharistie,
demandons au Christ serviteur d’ ouvrir notre intelligence et notre
cœur pour que nous acceptions joyeusement de le servir et de
l’accueillir dans nos frères.
André ROUL, diacre permanent
20 septembre 2009
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