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20e Dimanche ordinaire B
« Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi je demeure en lui ».
On
a beau être habitués à ce discours, avouez que ça donne froid dans le
dos ! « celui qui mange ma chair et boit mon sang… » On
comprend le scepticisme des juifs, et même leur rejet de Jésus,
lorsqu’ils entendent ces paroles ! « Celui qui me mangera vivra
par moi ». Comment ne pas penser à certaines tribus cannibales,
qui mangeaient leurs semblables pour obtenir leurs vertus, selon leur
croyance ? Et cet homme qui tient de tels propos, c’est celui-là
même qui prétend parler au nom de Dieu, être Dieu lui-même ? Quel
scandale ! « comment cet homme-là peut-il nous donner sa
chair à manger ? »
À l’époque où l’apôtre Jean écrit son
évangile, dont nous venons de lire un passage, les tout premiers
chrétiens sont déjà victimes de persécutions dans le monde romain. On
leur reproche surtout de refuser de vouer un culte à l’empereur,
sacrilège suprême puisque l’empereur est un dieu. Mais on leur reproche
aussi, même si ce n’est pas la cause première des persécutions, d’être
cannibales, justement, puisqu’ils doivent manger le corps de leur
maître et boire son sang pour être sauvés. Alors beaucoup de chrétiens
hésitent à continuer de pratiquer l’eucharistie, et sont tentés
d’abandonner ce rite par peur d’être repérés, puis arrêtés et mis à
mort. C’est pourquoi Jean insiste si fortement dans son évangile sur
l’importance de maintenir ce rite de l’eucharistie, malgré les risques,
malgré l’incompréhension de son sens de la part des non-croyants. Car
Jésus a dit « Prenez et mangez, c’est mon corps, prenez et buvez,
c’est mon sang ; vous ferez cela en mémoire de moi ».
Notre
esprit rationnel d’aujourd’hui nous pousse à interpréter ces paroles de
Jésus : « ma chair est la vraie nourriture, mon sang est la
vraie boisson » comme des paroles symboliques. Et personne
n’imagine sérieusement une discussion, à la sortie de la messe, sur le
parvis de l’église, entre paroissiens autour de la question des
juifs : « comment cet homme-là peut-il nous donner sa chair à
manger ? ». Bien sûr qu’il n’est pas question ici de
cannibalisme ! Notre compréhension ne doit évidemment pas
s’arrêter à cette image trop concrète ; elle doit aller au-delà,
dépasser cette image et plutôt chercher à se fixer sur le sens, sur la
signification de ces paroles. Pourtant, à la lumière de la
Résurrection, puis de la Pentecôte, les apôtres vont comprendre ces
paroles de Jésus non pas comme symboliques, mais comme prophétiques.
Jésus parle de son corps donné en vraie nourriture, lui qui va
véritablement donner sa vie ; de son sang comme vraie boisson, lui
qui va verser son sang sur la croix. Ce qu’il a dit, il l’a fait. Les
paroles de Jésus ne sont jamais des simples paroles de recommandations
ou d’ordres : « voilà comment vous devez faire, voici ce que
vous devez penser » comme le ferait un leader politique. Ce que
Jésus dit, il l’applique d’abord à lui-même ; il le met lui-même
en pratique. Ses actes parlent autant que ses paroles, et
viennent les compléter, les éclairer, les expliquer. Quand il donne son
corps, ce n’est pas qu’une image, qu’une façon de parler. Il ira
jusqu’au bout de ce don : « Ma vie, nul ne la prend :
c’est moi qui la donne ». Et ce don de lui-même, Jésus le
fait par amour. Il nous est assez facile de comprendre qu’une mère ou
un père accepte de donner sa vie pour sauver un de ses enfants. De
temps à autre, il arrive certains faits-divers de sauvetage qui nous
montrent des actes de courage et de don de soi qui forcent notre
admiration. Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour
ceux qu’on aime. Si le don de nos vies peut parfois permettre de sauver
une personne, et c’est très beau, Jésus, lui, donne sa vie, donne son
corps, pour sauver non pas une personne, mais l’humanité entière.
Lorsqu’il nous arrive de donner un peu de notre sang, peut-être
allons-nous permettre de sauver une vie, et c’est magnifique. Jésus,
lui, a versé son sang pour sauver la totalité de nos vies humaines.
C’est
pourquoi il ne nous est pas absurde de le remercier ! Or,
qu’est-ce que l’eucharistie ? C’est justement le
« merci » de l’humanité à son Sauveur pour le sacrifice de sa
vie. Eucharistie, action de grâce, au cours de laquelle, en mangeant
son corps, nous « rendons grâce », en remerciement de la
grâce, du cadeau gratuit qui nous est fait par ce don de Jésus. C’est
le psaume 33 que nous avons entendu tout-à-l’heure : « Je
bénirai le Seigneur en tout temps, sa louange sans cesse à mes
lèvres ». Et la lettre de St Paul aux Éphésiens reprend en
écho : « A tout moment et pour toute chose, rendez grâce à Dieu le
Père, au nom de notre Seigneur Jésus-Christ ». Cette attitude de
remerciement, ce n’est pas une simple politesse qui nous est demandée.
C’est un moyen pour vivre en harmonie avec Dieu, et donc avec nous-même
et avec les autres, avec la Création tout entière. C’est ce que la
Bible appelle la Sagesse. C’est le bon sens, l’intelligence toute
simple. Reprenons la lettre de St Paul dans la deuxième lecture :
« ne soyez donc pas irréfléchis ; ne vous enivrez pas,
laissez-vous plutôt remplir par l’Esprit Saint » Comment mieux se
laisser remplir par lui qu’en mangeant son corps ? Le passage du
livre des Proverbes, dans la première lecture, nous le disait lui
aussi : « Si vous manquez de sagesse, venez à moi ;
venez manger mon pain et boire le vin que j’ai préparé. Quittez votre
folie et vous vivrez, suivez le chemin de l’intelligence ». Ces
appels au bon sens, à la sagesse, à l’intelligence véritable, nous
invitent à cette vie en pleine harmonie. Harmonie rendue possible par
le don total de Jésus qui, en nous donnant son corps en nourriture,
sous la forme aussi fragile que ce tout petit morceau de pain, nous
montre ce qu’est le véritable amour : L’amour est don total, don
fragile et humble, mais don qui se fait nourriture capable de rassasier
toute notre vie.
Amen !
Daniel BICHET, Diacre permanent.
St Hilaire de Clisson - Maisdon sur Sèvre,
le 16 août 2009
Paroisse Ste Marie du val de Sèvre
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