Année
B
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18°
dimanche du Temps Ordinaire
Ex 16, 2-4.12-15
Ps 77, 3.4ac, 23-24, 25.52a.54a
Ep 4, 17.20-24
Jn 6, 24-35
On voit bien dans ces
textes à quel point Dieu s’intéresse à nous, et
combien il veut nous combler. La manne que les hébreux ont pu
recueillir chaque matin dans le désert, le pain que Jésus a multiplié
pour les foules, sont les marques de la tendresse de Dieu pour nous. Il
prend en compte nos besoins, notre faim, et il vient nous rassasier.
Pourtant, si Dieu se
montre plein de sollicitude envers nous, notre
attitude envers lui n’est pas toujours aussi bienveillante. Nous
pouvons nous reconnaître dans ces hébreux de la première lecture, qui
récriminent contre Moïse et Aaron : « Ah ! il aurait mieux valu mourir
au pays d’Egypte, quand nous mangions du pain à satiété ! » Voilà que
ce peuple obtient la liberté, par la force de Dieu qui les a sauvés,
mais il ne sait pas apprécier cette liberté. La faim lui fait même
prêter à Dieu de mauvaises intentions : « vous nous avez fait sortir
dans ce désert pour faire mourir de faim tout ce peuple assemblé ! »
Oui, nous aussi, nous sommes capables parfois de tenir ce genre de
propos, quand les circonstances nous paraissent défavorables, ou quand
des événements douloureux nous accablent : « mais qu’est-ce que j’ai
fait au Bon Dieu pour mériter ça ? » ou encore lorsque nous disons : «
Si Dieu était bon, il ne permettrait pas les guerres, ou la misère, ou
la mort de tel ou tel... ». Dans ces moments difficiles, c’est aussi la
faim qui nous égare. Que ce soit une faim louable, comme notre faim de
justice, de grandeur, de paix, de fratenité ; ou une faim plus égoïste,
comme notre faim de tranquillité ; dans tous les cas, la faim peut
devenir un obstacle dans notre relation à Dieu. Mais de quoi avons-nous
faim ? Dans nos sociétés où la plupart d’entre-nous prenons au moins 3
repas par jour – sans compter l’apéritif ! – que signifie avoir faim ?
si la moindre petite gêne à l’estomac en fin de matinée nous fait dire
« j’ai faim », comment pouvons-nous comprendre ceux pour qui manger est
un événement espéré pendant plusieurs jours ? Ils sont un milliard
aujourd’hui dans cette situation. Plus de quinze fois la population de
la France. Comment pouvons-nous les rejoindre, nous qui sommes,
globalement, plutôt dans l’opulence ? Il revient à chacun de nous
de trouver des réponses à cette question.
Pour autant, nos
faims à nous
sont bien réelles. Car l’homme ne vit pas seulement de pain, comme dit
l’Ecriture, mais de toute parole qui vient de Dieu. Et nos faims, si
elles peuvent paraître indécentes vis-à-vis de la faim de nos frères
qui meurent de malnutrition, sont pourtant aussi des chemins qui mènent
à la mort, si nous n’y prenons pas garde.
Oui, de quoi avons-nous faim ? Nous avons faim de ce qui nous manque.
La faim, c’est le désir causé par le manque. Pourtant, on pourrait se
dire que, dans le fond, on ne manque de rien. Et c’est le plus souvent
vrai, si on s’en tient au plan matériel. Mais en approfondissant un peu
la réflexion, on peut découvrir en nous-mêmes des manques, et même
parfois des manques douloureux. Car encore une fois, l’homme ne vit pas
seulement de pain. Même s’il est hyper-valorisé dans notre société de
consommation, le matériel n’est pas le tout de notre existence. Ces
manques, ils se cachent souvent dans nos liens. Nos liens avec Dieu,
nos liens avec les autres, nos liens avec nous-mêmes aussi. Les
relations que nous entretenons plus ou moins peuvent souvent devenir
des lieux de frustration, des lieux où le manque se révèle, et où le
désir – la faim – s’enracine, se développe et peut nous envahir
totalement. Quelles sont mes relations avec mon conjoint ? Avec mes
enfants ; mes parents ; ma famille ; mes amis ; mes collègues ; les
gens que je rencontre ? Ces relations sont-elles à la hauteur de ce que
j’en espère ? N’y a-t-il pas, au fond de moi, un désir secret de liens
plus forts qu’ils ne le sont avec telle ou telle personne ? N’y a-t-il
pas dans mon cœur une blessure à cause de cette incompréhension avec
celui-ci, ou de cette confiance rompue avec celle-là ? Et vis-à-vis de
Dieu, n’ai-je pas quelque part cette peur de ne pas être à la hauteur,
de ne pas être digne de lui ? N’ai-je pas le désir d’être meilleur que
je ne le suis ? Le regard que j’ai sur moi-même est-il aussi
bienveillant que celui de Dieu sur moi ? Tous ces petits ou ces grands
manques, mis ensemble, constituent une béance, un vide, qui nous fait
ressentir un désir, une faim.
Si nous sommes
capables de suffisamment
de lucidité pour voir nos manques, pour discerner ce qui attise notre
faim, combien plus ce Dieu que nous révèle Jésus est à même de les
comprendre ! Combien plus il pourra user de sa miséricorde pour venir
au secours de notre faim, comme il l’a fait dans le désert avec son
peuple en exode ! Jésus nous le redit dans l’évangile d’aujourd’hui : «
C’est mon Père qui donne le vrai pain venu du ciel. Le pain de Dieu,
c’est celui qui descend du ciel, et qui donne la vie au monde. » Alors,
nous aussi, nous avons envie de lui demander, comme ses disciples : «
Seigneur, donne-nous de ce pain-là, toujours ! » et nous entendrons
Jésus nous répondre : « Moi, je suis le pain de la vie. Celui qui vient
à moi n’aura plus jamais faim ; celui qui croit en moi n’aura plus
jamais soif. »
Amen !
Daniel BICHET, diacre permanent.
Boussay et Clisson,
Le 5 août 2012.
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