Je me souviens, il y a plusieurs années, dans une enquête pour un
magazine dont le sujet central était la Trinité ; une question était
posée aux chrétiens : « lorsque vous priez Dieu, à qui s’adresse votre
prière ? » Les réponses montraient une répartition assez homogène entre
ceux qui prient plutôt le Père, ceux qui prient Jésus, le Fils, et ceux
qui s’adressent plutôt à l’Esprit Saint. Ce qui semble montrer que pour
certains, Dieu est d’abord un père, le Créateur de toute chose ; pour
d’autres, Dieu c’est plutôt Jésus, le Fils, celui qui a partagé notre
condition humaine, qui a prêché sur les routes de Palestine et qui a
donné sa vie pour nous. Et pour les autres enfin, Dieu, c’est l’Esprit
Saint qui fait vivre son Église, qui agit en nous et se manifeste à
travers la marche de l’histoire humaine.
En réalité, évidemment, ils ont tous raison ! Dieu est Trinité, à la fois Père, Fils et Esprit.
Nous fêtons justement aujourd’hui la Sainte Trinité, en ce premier dimanche après la Pentecôte.
S’il est un mystère difficile à expliquer, c’est bien celui de la
Trinité ! Un seul Dieu, en 3 personnes ! Ce qui fait dire à certains,
en-dehors des églises chrétiennes, que nous ne sommes pas monothéistes
: ils nous soupçonnent d’avoir 3 dieux, et même 4 pour certains qui
nous ajoutent une déesse avec la Vierge Marie !
De fait, aucun texte de la Bible ne mentionne le mot Trinité pour
désigner Dieu. Ce mot a été forgé par Tertullien au tout début du 3ème
siècle pour rendre compte de la réalité divine : le Père, le Fils et le
Saint-Esprit, l’unité en 3 personnes : tri-unité, trinité. Toutes les
confessions chrétiennes, catholiques, orthodoxes, protestants, sont
d’accord sur ce concept de trinité, même s’il n’est pas compris
exactement de la même manière par chacun. Mais le sondage dont je
parlais tout à l’heure montre bien que la Trinité n’est pas juste une
notion symbolique ou imagée, inventée par de savants théologiens :
qu’on la nomme ou pas, elle est une réalité comprise de manière
intuitive par l’ensemble des chrétiens : il y a le Père, il y a le
fils, et il y a le Saint Esprit.
Mais finalement, l’important, ce ne sont pas les mots, qui pourraient
diviser. Ce qui serait un comble, puisque Dieu est unité ! L’important
tient en deux choses au moins : la première, c’est de savoir que ce
Dieu qui est notre Dieu – et le seul Dieu – Père, Fils et Esprit, est
un Dieu d’amour, qui nous aime infiniment plus que nous ne savons
aimer. C’est ce que nous rappellent tous les textes de ce dimanche.
Dans la première lecture, Dieu se présente à Moïse comme « Le Seigneur,
Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère, plein d’amour et de
vérité ». Dans la deuxième lecture, St Paul parle d’un « Dieu d’amour
et de paix ». Et dans l’Évangile, St Jean nous dit que « Dieu a
tellement aimé le monde qu’il a donné son fils unique ». La notion
centrale, vers quoi tout converge, c’est l’amour.
La seconde chose importante, c’est de comprendre que, parce Dieu est un
Dieu amour, son jugement est un jugement d’amour. « Nous serons jugés
sur l’amour » disait St Jean de la Croix.
Mais le jugement, ça fait peur. Nous avons tous en tête les
représentations du Jugement Dernier, avec à la droite de Dieu les
sauvés accueillis par des anges souriants, et à sa gauche, les damnés
entourés de démons qui les précipitent dans les flammes de l’enfer.
Mais l’évangile de ce jour nous montre bien l’articulation qu’il y a
entre le jugement de Dieu, le salut (être sauvé), et la foi. « Dieu a
envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour
que, par lui, le monde soit sauvé. »
Ce que nous dit St Jean, c’est qu’il ne faut pas craindre le jugement
de Dieu comme on craint le jugement des hommes. Le jugement de Dieu,
c’est l’autre nom du salut. Dieu nous juge en nous sauvant, ou
inversement Dieu nous sauve en nous jugeant. « Celui qui croit en lui
échappe au jugement » ajoute St Jean. Tout au long de la Bible quand il
est question du jugement, on nous parle en fait du salut, de l’amour et
de la bienveillance de Dieu pour les hommes.
Mais revenons à la Trinité : même si le mot « trinité » n’existait pas
encore, St Paul y fait déjà allusion dans la deuxième lecture, dans la
salutation qu’il adresse aux Corinthiens : « Que la grâce du Seigneur
Jésus Christ, l’amour de Dieu et la communion du Saint-Esprit soient
avec vous tous. » Vous aurez reconnu au passage la salutation que le
prêtre a dit au début de la messe : « La grâce de Jésus-Christ, notre
Seigneur, l’amour de Dieu le Père, et la communion de l’Esprit Saint
soit toujours avec vous » et nous avons répondu : « et avec votre
esprit ». On voit donc bien que dès les tout débuts de l’Église
naissante, la notion de Trinité est présente, sans être nommée.
Et puis, la Trinité, on la retrouve aussi – et d’abord – dans notre
Credo. Que ce soit celui que l’on appelle le « symbole des Apôtres »,
celui de Nicée-Constantinople, ou la « profession de foi baptismale »
notre Credo est structuré de manière à orienter notre foi vers trois
grandes directions : « je crois en Dieu, le Père tout-puissant » ; « je
crois en Jésus-Christ son Fils unique, notre Seigneur » ; « je crois en
l’Esprit Saint ». Et chacun des paragraphes explique plus ou moins,
selon les versions, qui est chacune de ces personnes. Mais les trois
personnes sont bien un seul et même Dieu.
Je ne sais pas quelle réponse chacun de nous aurait donnée à cette
question du sondage dont je parlais au début. Ça pourrait d’ailleurs
être un sujet de méditation personnelle pour ce dimanche ! Mais je vous
propose cette prière que je répète souvent, à la manière du Pèlerin
Russe, d’après cette prière qu’on appelle « prière de Jésus » ou «
prière du cœur » et que j’ai élargie aux trois personnes de la Trinité :
« Seigneur Jésus, fils de Dieu, Christ ressuscité, sauveur, envoie ton
Esprit Saint ! Qu’il répande la miséricorde du Père sur nous, pécheurs.
»
« Seigneur Jésus, fils de Dieu, Christ ressuscité, sauveur, envoie ton
Esprit Saint ! Qu’il répande la miséricorde du Père sur nous, pécheurs.
»
« Seigneur Jésus, fils de Dieu, Christ ressuscité, sauveur, envoie ton
Esprit Saint ! Qu’il répande la miséricorde du Père sur nous, pécheurs.
»
…
Au nom du Père, du Fils, et du Saint Esprit !
Amen !
Daniel BICHET, diacre permanent
Clisson et Gétigné, le 7 juin 2020