Dimanche de la Sainte Famille
Si 3, 2-6.12-14 ; Ps 127 ; Col 3, 12-21 ; Mt 2, 13-15.19-23
Comme chaque année, en ce premier
dimanche après Noël, nous fêtons la Sainte Famille de Nazareth. C’est
l’occasion de célébrer nos propres familles, qui souvent se rassemblent
en cette période de fêtes. Les textes de ce jour sont tous des hymnes à
la famille. Ils précisent, chacun à sa manière, le rôle et la
particularité de chacun de ses membres.
L’évangile aujourd’hui nous
raconte une « tranche de vie » de la Ste Famille. On y voit Joseph en
vrai chef de famille. C’est lui qui agit, sur les recommandations de
l’ange de Dieu. C’est lui qui décide de partir, de revenir, de
s’installer à Nazareth. Parce qu’il reste toujours à l’écoute de Dieu,
il agit non-pas pour sauvegarder ses intérêts personnels, mais en vrai
responsable de la vie de son épouse Marie et de son fils Jésus. Son
obéissance à Dieu fait de lui un modèle de père de famille, et aussi un
modèle de croyant, obéissant dans la confiance.
Les autres textes ne nous
racontent pas l’histoire d’une famille, mais nous donnent des indices
pour vivre en fraternité, en enfants d’un même père, en enfants de
Dieu. Ils nous proposent des pistes, comme un idéal de vie à atteindre,
en nous situant dans le monde, parmi et avec nos frères et sœurs en
humanité.
Le psaume 127 nous donne une
image toute simple de la famille heureuse, celle qui écoute la voix du
Seigneur :
« Ta femme sera dans ta maison
comme une vigne généreuse,
et tes fils, autour de la table,
comme des plants d'olivier. »
St Paul, quant à lui, nous propose quelques règles de vie en société et en famille.
Bien-sûr, les préceptes que contiennent ces textes anciens peuvent nous
paraître un peu désuets. Mais, nous le savons bien, ils s’adressent
tout spécialement à un public donné, dans une société donnée, à une
époque donnée. Cependant, il ne faudrait pas les classer trop vite dans
le rayon des antiquités, sous prétexte que certaines phrases peuvent ne
pas correspondre aux mœurs de notre temps ! Si l’Eglise nous propose
ces textes-là pour aujourd’hui, c’est qu’ils ont encore quelque chose à
nous dire, à nous, en ce début de XXIème siècle.
Nous le constatons, la famille
telle qu’elle est perçue depuis des millénaires et sous toutes les
latitudes, est remise en question par certains, au prétexte que l’homme
devrait se départir de ses stéréotypes sociaux pour accéder à la
liberté. Ils appellent de leurs vœux l’avènement de « l’homme
nouveau », affranchi de toute contrainte, particulièrement celles qui
sont héritées du passé, l’homme coupé de ses racines comme si elles
étaient un frein à son épanouissement. C’est la pensée de quelques-uns,
véhiculée et amplifiée par les médias, dans le but de devenir à terme
la pensée de tous.
Cette expression d’« homme
nouveau », c’est justement celle qu’emploie St Paul dans la phrase qui
précède immédiatement le passage que nous venons d’entendre : « vous
vous êtes dépouillés du vieil homme et vous avez revêtu l’Homme Nouveau
» écrit-il aux chrétiens de Colosse. Et dans la suite du texte, le
passage d’aujourd’hui, il décrit cet Homme Nouveau en donnant quelques
recommandations concernant la vie concrète. Ce qui est remarquable,
c’est que ces recommandations portent toutes sur la relation de l’homme
avec Dieu d’abord, puis avec ses proches ensuite. Dans l’homme nouveau
que l’on nous propose aujourd’hui, il n’est plus question de Dieu,
bien-sûr, mais surtout il n’est plus question non-plus de relation.
L’homme doit s’autodéterminer, se penser par lui-même, pour lui-même,
indépendamment de toute influence extérieure. La relation disparaît,
elle n’est plus indispensable en tant que telle dans cette nouvelle
idéologie. C’est ainsi que, comme une conséquence logique, la famille,
terreau primitif de la relation, perd sa place dans la hiérarchie des
valeurs, au profit de notions individualistes comme l’opinion
personnelle, la réussite, la santé, le plaisir et le bien-être.
Pourtant, si on relit bien ces textes anciens, comme celui de Ben Sirac
le Sage, on y rencontre, en action, la Sagesse qui préside à toute
relation heureuse, harmonieuse, source de bonheur :
« Celui qui glorifie sa mère est comme celui qui amasse un trésor ;
Celui qui honore son père aura de la joie dans ses enfants, au jour de sa prière il sera exaucé.
Celui qui glorifie son père verra de longs jours, celui qui obéit au
Seigneur donne du réconfort à sa mère. »
Le secret du bonheur semble se
tenir dans le simple respect envers les parents qui nous ont donné la
vie.
Je voudrais souligner particulièrement les versets 12 et 13 de ce chapitre 3 :
« Mon fils, soutiens ton père dans sa vieillesse [...] Même si son
esprit l'abandonne, sois indulgent, ne le méprise pas, toi qui es en
pleine force. » En méditant ces versets, comment ne pas penser à ce que
certains nous préparent, en proposant le droit à l’euthanasie pour
tous, comme solution finale à la souffrance, à la maladie, à la
vieillesse. Quelle démission de l’homme devant l’épreuve ! Quelle
triste conception de la dignité de toute personne ! Pouvons-nous
accepter que notre société n’ait plus d’égards pour ses anciens ? En
s’éloignant de Dieu, elle choisit la mort, plus facile, moins coûteuse
que l’accompagnement dans l’amour. La relation familiale devient
embarrassante, au lieu d’être dynamisante, stimulante pour la vie.
Frères et sœurs en Christ,
revenons à Dieu ! Reprenons force en écoutant sa Parole qui nous sauve,
en redécouvrant les joies simples mais vraies de la relation familiale.
Défendons la vie ! Elle est don de Dieu, à travers un père et une mère,
au sein d’une famille qui reste malgré tout le lieu le plus
indispensable à l’épanouissement de la vie pour chacun de ses membres.
Certes, la vie familiale n’est
pas toujours sans douleurs. Mais les épreuves vécues dans la famille ou
à cause d’elle, au lieu d’être des obstacles au bonheur, peuvent
devenir au contraire des lieux de croissance, si on s’efforce d’être
attentif à la Parole de Dieu qui s’adresse à chacun de nous dans le
fond de notre cœur. Parole qui nous est transmise par la plume de
St Paul : « Agissez comme le Seigneur : il vous a pardonné, faites de
même.
Par-dessus tout cela, qu'il y ait
l'amour : c'est lui qui fait l'unité dans la perfection. » Le pardon,
l’amour. Essayons, frères et sœurs, chacun à notre place, de contribuer
à bâtir un monde qui s’appuie sur ces deux piliers de la fraternité :
le pardon et l’amour. Le pardon comme moteur du lien fraternel, l’amour
comme son carburant. Dans nos familles, dans toutes nos relations, dans
notre société, dans notre monde.
Par-dessus tout cela, qu’il y ait l’amour !
Amen !
Daniel BICHET, diacre permanent
Clisson et Gétigné,
le 29 décembre 2013
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