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3° dimanche de carême.

Quelle eau pour quelle soif ?

Cette histoire de la Samaritaine, nous l’avons tellement entendue que nous avons l’impression de la connaître « par cœur » ?
Comment peut-elle encore nous étonner, nous saisir au point de nous bousculer dans notre routine ? Cette femme, comment me rejoint-elle dans mon quotidien. Cette histoire banale, apparemment, d’une femme qui a besoin d’eau pour faire lessive et cuisine, comment rejoint-elle notre vie de communauté ?

Aujourd’hui nous ne connaissons plus les rencontres autour du puits : le puits en plein désert ou le puits du village ; près duquel tant de relations sont nées. Jésus, lui, y engage un des dialogues les plus célèbres, auprès d’un puits de Palestine.
Quelle histoire ! La Samaritaine en a oubliée sa cruche 
Cette femme qui vient chaque jour avec sa cruche, à une heure où le soleil tape fort voulait passer inaperçue. Pas de chance, elle rencontre quelqu’un, un homme en plus ; et même un juif, elle qui est femme et une Samaritaine… - deux critères de discrimination et d’exclusion, les juifs détestaient et méprisaient les samaritains – mais Jésus va abattre ces murs de séparation !
Fatigué, assoiffé, il fait chaud, il commence par lui demander à boire : « Donne-moi à boire » et sur le bords du puits la conversation s’engage ; bavardage qui se transforme en un bel itinéraire de foi.
Cette soif d’une rencontre vraie anime toute la vie de Jésus, jusque sur la croix où il dira : « j’ai soif »
Si l’homme cherche Dieu depuis toujours, Dieu est parti à sa rencontre encore depuis plus longtemps. N’est-ce pas Jésus qui fait le premier pas en demandant à boire ?

Revenons à la Samaritaine, elle est certainement en quête de sens à sa vie, en allant puiser elle devait remuer dans sa tête tous ses problèmes, surtout sentimentaux. Ils doivent bien ressembler aux nôtres quand nous sommes encombrés et préoccupés de nous-mêmes ? en ces temps où l’individu est roi et que le repli sur soi se renforce…
« Ce qui compte aujourd’hui, c’est d’être bien dans ses baskets ! mais l’on ne se préoccupe pas toujours de savoir si l’autre en a ! !  (disait Mgr Defois)
Et puis n’y a-t-il pas chez nous aussi, au sein même de notre communauté, d’éternelles questions religieuses. Où faut-il adorer ? sur le Mt Garizim ou au Temple de Jérusalem ? aujourd’hui n’en sommes-nous pas encore aux mêmes questions qui divisent et provoquent des affrontements, des incompréhensions : comment faut-il célébrer l’eucharistie ? est-ce que c’est liturgique ou ça ne l’est pas (faut-il conserver les 2 lectures) et le droit canonique ? Faut-il être du renouveau charismatique ou chrétien de gauche, en fraternité de réflexion et de prières ou engagé et militant dans un mouvement d’A C ? catholique ou protestant, pour la théologie de la libération ou la combattre etc…  Jésus n’a qu’une réponse : « adorer Dieu en esprit et en vérité »  Dieu n’est pas localisable, Il ne se laisse jamais enfermer dans des structures étroites. Il peut être rencontré partout, là où tout homme chemine, là où l’homme est vrai. Ce qui, dans cette rencontre d’une exceptionnelle qualité, fait dépasser tous les quiproquos et les malentendus, c’est la volonté de clarté et de transparence de Jésus et c’est l’acceptation de cette même clarté, de cette même transparence par la Samaritaine. C’est bien quand il en est ainsi entre nous, en EAP, dans les structures de l’Eglise comme dans la vie publique et sociale et à plus forte raison familiale ; qu’il est possible d’aller au plus profond, aux vrais questions avec des chances d’aboutir sur de vraies réponses.   Oui cette femme de Samarie dont Dieu est amoureux, c’est chacune et c’est chacun, là où nous sommes mal, c’est toute l’humanité bien souvent égarée.
Quel texte ! ! ! Toute personne peut faire la rencontre de Dieu quelle que soit sa religion, sa race. Il lui suffit d’être vrai. Le don de Dieu est pour quiconque a faim et soif de justice et d’amour.
Un vieux sage qui posait un jour la question à ses interlocuteurs : «Où peut-on rencontrer Dieu ? » le musulman parle de sa mosquée, le juif du Mur des lamentations… un autre la nature ; le chrétien se permet, lui, de citer la messe dominicale. Chaque fois le vieil homme hoche la tête, aucune réponse ne le satisfait. Il reprend la parole : « tu rencontres Dieu chaque fois que tu lui ouvres la porte de ton cœur »
Avez-vous remarqué comme la Samaritaine tente de résister : de l’eau vive ? sa cruche quotidienne lui suffit. Comment pourrait-il lui apporter plus ? Ah ou alors une eau qui la dispense de puiser…Effectivement, comme elle, ne serions-nous pas intéressés par une religion qui nous rendrait la vie plus confortable ?

La Samaritaine c’est vous, c’est moi. Ne fait-elle pas tout pour ne pas devoir se remettre en question, pour détourner la conversation quand elle se sent coincée ? Elle est encombrée de questions et de problèmes qui vont de la cruche au débat religieux en passant par ses difficultés sentimentales. Et soudain, la voilà retournée par celui qui l’accueille telle qu’elle est, la fait exister comme personne n’a su le faire jusque là. Elle lui ouvre alors la porte de son cœur, se laisse saisir, elle accueille le don et le pardon et va trouver sens à sa vie. Transformée, elle laisse sa cruche et court partager sa découverte. C’est elle qui va conduire les villageois à Jésus. Jésus qui parle d’eau jaillissante veut peut-être nous dire que l’eau qui jaillit de nos cœurs de croyants peut désormais en abreuver d’autres. C’est en tout cas ce que vit la Samaritaine : « J’ai rencontré le Messie »
Elle… l’étrangère ;  elle… la femme légère que l’on désignait du doigt ; elle… dont on n’attendait plus rien.. La voilà porteuse d’une Bonne Nouvelle, la voilà missionnaire ! ! n’est-ce pas le sens de la démarche d’Ecclésia : offrir une Parole qui fait vivre de la part du Christ ? comme la Samaritaine, nous sommes, chaque dimanche, invités à retourner dans le monde à notre vie ordinaire : dans mon milieu professionnel, dans le quartier, la cité, l’association… Auprès des puits modernes, des hommes et des femmes sont en quête de sens, de dignité, de justice et de respect, de raison de vivre, d’eau vive. Comment y répondre sans entrer en dialogue pour connaître les attentes profondes des personnes ?

En ce temps de Carême, laissons-nous interroger :
de quoi ai-je soif, suis-je attentif aux soifs des autres, suis-je animé par une véritable recherche de Dieu ?
Je peux repérer un lieu, une démarche, une rencontre, un moment où je lui ouvre plus facilement mon cœur pour me laisser saisir et questionner par LUI ?
Suis-je prêt à croire que quelqu’un puisse encore m’étonner et me transformer ?
Et surtout suis-je disposé à vivre vrai ? en me désencombrant de tout ce qui me détourne de la seule vraie question :
Y a-t-il dans ma vie un puits au bord duquel je vais pouvoir rencontrer Jésus et me souvenir de mon baptême ?


François CORBINEAU, diacre permanent.

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