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3° dimanche de carême.


Ex 17, 3-7 ; Ps 94 1,9 ; RM 5, 1-2. 5-8 ; JN 4, 5-42


Je ne sais pas si vous connaissez la liturgie des heures ? c’est un livre de prières chantées, destiné à tout chrétien qui souhaite marquer, plusieurs fois par jour, un temps de présence avec Dieu. Les religieux, en monastère ou dans le monde, ainsi que les prêtres, ont ainsi sept temps de prière, sept offices qui rythment leur journée : Au milieu de la nuit, l’office des Lectures, ou Vigiles ; puis Laudes au lever du jour ; ensuite, Tierce, Sexte, None, puis les Vêpres en fin de journée, et enfin complies juste avant le coucher. Aux diacres, il est demandé d’être fidèles au moins aux laudes et aux vêpres, chaque jour. Mais de plus en plus de chrétiens laïcs se mettent à pratiquer, eux aussi, cette liturgie des heures, seuls ou avec d’autres, selon la forte invitation de Vatican II.
Le psaume 94 dont nous avons entendu ce (soir / matin) quelques versets, c’est justement le tout premier psaume qui ouvre, chaque matin, l’office des Laudes. Il redit chaque jour à celui qui le prie que Dieu est toujours avec lui. Chaque matin, le chrétien qui prie la Liturgie des Heures est ainsi invité à commencer sa journée en renouvelant sa confiance en son Créateur, à s’incliner devant lui, à le louer, l’acclamer dans la joie et lui remettre sa journée en toute confiance.
Pourquoi est-ce que je vous parle de ça ? Parce que c’est justement de cette nécessité de vivre la confiance que nous parlent tous les textes d’aujourd’hui. Une confiance en un Dieu toujours présent, et toujours bienveillant.
Aujourd’hui, nous n’en sommes qu’au premier tiers du Carême, qui est encore bien long devant nous. Et tout comme les hébreux dans leur longue marche au désert, nous sommes confrontés à des épreuves de toutes sortes. Et nous sommes alors tentés de perdre confiance.
La première lecture, tirée du Livre de l’Exode, nous apprend que c’est la soif du peuple qui sera le détonateur de cette tentation, que l’on pourrait appeler tentation originelle, puisqu’on la trouve déjà dans les tout premiers chapitres de la Genèse : la perte de confiance en Dieu, c’est-à-dire l’exact contraire de la foi.
Ce peuple, donc, mène une vie de nomade, dans la chaleur du désert, de point d’eau en point d’eau, et il semble qu’en ces jours-là, l’eau justement venait à manquer. On comprend alors l’inquiétude de ces gens, leur angoisse même devant cette épreuve de la soif qui met leur vie en grand danger. Si c’est bien Dieu qui les a poussés à quitter leur relatif confort en Égypte, quel est donc ce Dieu qui va les faire périr dans le désert ? Le doute se réveille alors parmi ce peuple assoiffé. Dieu est-il vraiment celui qui l’a choisi parmi tous les peuples de la terre ? Est-il bien ce Dieu qui est censé le protéger, et le conduire vers une vie meilleure ? Ce Dieu-là est-il vraiment avec eux ? Leur doute est formulé par cette question fondamentale : « le Seigneur est-il au milieu de nous, oui ou non ? »
Et la réponse est sans équivoque. Moïse frappe le rocher comme Dieu le lui a prescrit, et l’eau jaillit du rocher. Oui, à l’angoisse de son peuple, le Seigneur apporte le réconfort. À la soif de celui qui le prie, même dans le doute ou les reproches, Dieu manifeste sa présence bienveillante.
Frères et sœurs, ce récit nous concerne, nous aussi. Nos inquiétudes devant l’avenir, nos angoisses, nos peurs, nous mènent tous vers les tentations que les hébreux ont connues au désert : « le Seigneur est-il au milieu de nous, oui ou non ? » Cette question est encore la nôtre aujourd’hui ! Le Seigneur que nous célébrons ensemble en ce jour comme chaque dimanche, est-il vraiment là, présent parmi nous ? Cette question universelle révèle la soif de toute l’humanité d’être apaisée de ses angoisses, de ses inquiétudes devant la souffrance et la mort. Et la réponse chrétienne, c’est l’abandon dans les bras du Père, qui seul peut répondre à ces angoisses, en nous donnant à boire de cette eau qui apaise durablement notre soif.
C’est ce que nous enseigne aussi l’évangile d’aujourd’hui, où le disciple St Jean nous propose une fois encore un récit bien mystérieux. Partant de l’eau du puits où cette femme vient puiser, de sa soif à apaiser, Jésus va orienter le dialogue vers l’adoration. Le verbe adorer revient huit fois dans la réponse de Jésus. Il s’agit désormais, nous dit-il, d’adorer non-pas dans un lieu précis, mais « en esprit et en vérité », car « Dieu est esprit ». Peu importe l’endroit où on se trouve, puisque l’esprit de Dieu ne peut se limiter à un lieu géographique. Jésus dit à la Samaritaine, et il nous dit aussi à nous bien-sûr, que Dieu nous est accessible en mettant notre propre esprit en communion avec le sien. C’est ce que produit la prière : la mise en présence de notre esprit dans l’esprit de Dieu. C’est ça, adorer Dieu en esprit et en vérité. « Tels sont les adorateurs que recherche le Père. »
Ici encore, c’est la confiance qui est en jeu. En effet, c’est tout de même plus concret, plus facile à concevoir qu’il existe un lieu précis, comme un temple, une église, ou on peut rencontrer Dieu. On peut même y placer une statue, une icône, une petite lumière pour matérialiser encore plus sa présence. De même que pour accéder à l’eau qui étanche la soif, il fallait aller jusqu’au puits, de même pour adorer Dieu, il semblait nécessaire de se déplacer jusqu’au temple. Mais Jésus nous demande cet acte de foi, de confiance, qui consiste à croire ce que nous ne voyons pas, à adorer « en esprit et en vérité » et non dans un lieu particulier.
  C’est ce que proclamait déjà le livre du Deutéronome, et que St Paul va reprendre dans sa lettre aux Romains : « la parole est dans ta bouche et dans ton cœur ». C’est donc d’abord en nous-mêmes, dans notre cœur, au plus profond de notre être, qu’il nous faut aller puiser cette eau qui étanchera notre soif.
Oui, frères et sœurs, ce carême qui nous met en marche vers Pâques ne nous épargnera pas les tentations. Les résolutions que nous avons prises, les sacrifices peut-être que nous nous imposons à nous-mêmes, peuvent nous aider à y résister, mais ne nous seront d’aucune efficacité si nous ne gardons pas fermement en nous, jour après jour, la confiance en Dieu, ce Père bienveillant et toujours présent, pour qui notre vie a du prix. Ce Dieu qui vient étancher notre soif en nous donnant cette eau qui deviendra en [nous] une source d’eau jaillissant pour la vie éternelle. »
La seule vraie réponse à toutes nos tentations, c’est la foi.
Amen !
 
Daniel BICHET, diacre permanent
12 mars 2023
Monnières, Gétigné et Clisson

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