3° dimanche de carême.
Rites de l'initiation chrétienne : premier scrutin
Bouleversant !
C’est le mot qui me semble le mieux convenir pour cette célébration de
ce soir. Bouleversant tout d’abord par sa liturgie, qui est elle-même
bouleversée : nous sommes dans l’année liturgique B, ce qui
signifie que les lecture des messes dominicales sont celles qui
correspondent à cette année B. Pourtant nous venons de lire les textes
du troisième dimanche de carême de l’année A : le chapitre 17 du
livre de l’Exode, le psaume 94, la lettre de St Paul aux Romains, et
enfin l’Evangile de la Samaritaine. Pourquoi ce bouleversement ?
Parce qu’aujourd’hui, notre paroisse accueille 3 catéchumènes :
Suzy, Gwenaëlle et John qui sont ici ce soir. Sur leur chemin vers le
baptême, qui aura lieu ici-même, dans cette église, lors de la
prochaine veillée pascale, ils ont à vivre un certain nombre
d’étapes : Il y a 2 semaines, premier dimanche de carême, ils
recevaient l’appel décisif de l’Eglise, par la voix de notre évêque, en
l’église de Vallet. Les cinquante catéchumènes du diocèse étaient
présents pour cette magnifique cérémonie. Aujourd’hui, c’est pour eux
l’étape que l’on appelle la célébration du premier scrutin. Samedi
prochain, ici encore, ce sera la célébration du deuxième scrutin. Mais
que sont donc ces scrutins ? Quelle est leur signification, leur
sens ? Dans le mot « scrutin », on reconnaît la racine
commune au verbe scruter, observer avec une grande attention. Dans un
contexte électoral, il s’agit de scruter l’électorat : de récolter
et de comptabiliser, une à une, les opinions de chaque électeur. Dans
le contexte de la préparation au baptême, il s’agit, pour chacun des
catéchumènes, de scruter les recoins de son propre cœur ; de se
laisser éclairer par la lumière du Christ, pour discerner entre la
lumière et les ténèbres. C’est une invitation à se convertir ; à
se tourner vers le Seigneur pour se voir à sa lumière. Et cette
démarche, si elle est vécue en profondeur, peut être
bouleversante ! Elle peut faire basculer un cœur, une vie.
Et
pour célébrer ces deux scrutins, le rituel de l’initiation chrétienne
des adultes recommande d’utiliser les lectures des dimanches de carême
de l’année A. Voilà donc l’origine de ce petit bouleversement dans la
liturgie de la Parole de ce soir.
On pourrait se demander :
mais pourquoi donc ce bouleversement ? pourquoi ces textes de
l’année A conviennent-ils mieux ? Eh bien sans doute parce qu’ils
ont quelque chose de particulier à nous dire, en lien avec l’événement
que préparent ces catéchumènes. Quelque chose à vous dire à vous,
Gwenaëlle, Suzy et John, mais aussi à nous qui sommes baptisés depuis
bien longtemps. Car ces textes ont, eux aussi, quelque chose de
bouleversant ! Quoi d’autre qu’un bouleversement, dans le cœur de
la Samaritaine, qui était venue chercher de l’eau à ce puits, comme
chaque jour, et qui, au contact de Jésus, à l’écoute de sa parole, lui
demande : « donne-moi de cette eau dont tu parles, que je
n’aie plus soif, et que je n’aie plus à venir ici la puiser ».
Bouleversement pour cette femme qui, peu à peu, comprend, par ce qu’il
lui dit, par ce qu’il lui révèle d’elle-même, que cet homme au bord du
puits n’est pas un homme comme les autres, mais un prophète, et bien
plus qu’un prophète. Par ce regard de Jésus qui a scruté le cœur de la
Samaritaine, non pas pour le juger, mais pour lui ouvrir une espérance,
en lui montrant la vérité de son état : « Tu as raison de
dire que tu n’as pas de mari, car tu en as eu cinq, et celui que tu as
maintenant n’est pas ton mari ; là, tu dis vrai » Par ce
regard bienveillant de Jésus, donc, la Samaritaine est bouleversée de
l’intérieur, et sa vie va en être, elle aussi, bouleversée. La suite du
texte nous apprend qu’elle va retourner en ville et proclamer à tout le
monde ce qu’elle a compris au fond de son cœur. Et on peut imaginer le
bouleversement que cela va produire aussi pour ces gens, à leur tour.
Regard
bouleversant de Jésus qui scrute notre cœur et qui nous aide à voir, à
travers son regard, ce qui, en nous, est chemin de ténèbres, chemin
sans issue, chemin d’aridité, de sécheresse. Parole de Jésus qui nous
bouleverse en nous indiquant un lieu pour étancher notre soif, soif
d’une vie plus belle, plus épanouie, plus rayonnante.
Frères et
sœurs, baptisés de longue date et vous, Gwenaëlle, Suzy et John, qui
frappez à la porte de l’Eglise et qui serez très prochainement
baptisés ; vous, leurs accompagnateurs sur ce long chemin ;
nous tous et tous ceux que nous connaissons ; nous avons tous
soif. De même qu’au désert, dans la première lecture, « le peuple
avait soif ». Et comme le peuple au désert, comme la Samaritaine,
nous sommes incapables, par notre seule force, notre seule volonté,
d’étancher cette soif. Notre seul espoir est de demander
« donne-nous à boire ! ». Cela nécessite une grande
humilité. Il nous faut nous mettre à l’écoute de celui que Dieu nous
envoie : c’était Moïse autrefois, pour le peuple hébreux assoiffé
dans le désert, et c’est aujourd’hui Jésus pour nous, dans les déserts
de nos vies parfois si arides et desséchées. C’est Jésus qui est venu
donner sa vie pour nous, pour chacun de nous.
Ce que les
catéchumènes expérimentent à travers ces scrutins, c’est cet amour
unique et total de Jésus pour chacun d’entre-nous, quelle que soit
notre vie, quel que soit notre péché. Et Jésus va nous aimer jusqu’à en
mourir. St Paul nous le rappelle aujourd’hui : « accepter de
mourir pour un homme juste, c’est déjà difficile ; peut-être
donnerait-on sa vie pour un homme de bien. Or, la preuve que Dieu nous
aime, c’est que le Christ est mort pour nous, alors que nous étions
encore pécheurs. » Un tel amour ! n’est-ce pas
bouleversant ?
Daniel BICHET, diacre permanent.
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