« Dès que Jésus fut baptisé, il remonta de l’eau, et
voici que les cieux s’ouvrirent : il vit l’Esprit de Dieu descendre
comme une
colombe et venir sur lui. Et des cieux, une voix disait : « Celui-ci
est mon
Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie. » (Mt
3, 16-17)
Vous vous étonnez sans doute
de m’entendre
commencer mon propos par la lecture de la fin du chapitre 3 de
l’évangile de
Matthieu, celui qui décrit le baptême de Jésus par Jean le
Baptiste !
C’est tout simplement parce que l’évangile de ce premier dimanche de
Carême se situe juste après celui-ci, puisque nous sommes ce dimanche au
début
du chapitre 4. La relecture dans le chapitre 3 nous permet justement de
bien
faire le lien entre les 2 évènements relatés par l’apôtre Matthieu au
début de
son évangile.
Jésus qui vient d’être baptisé par l’eau, a aussi reçu l’Esprit, et
c’est l’Esprit Saint qui le conduit aujourd’hui face à Satan dans le
désert.
Après avoir vécu son enfance auprès de Marie et de Joseph, caché avec
eux en
Egypte puis de retour à Nazareth, Jésus vient à la rencontre de Jean,
concrétisant
ainsi les propos de l’apôtre dans le désert de Judée : « Convertissez-vous !
c’est
lui dont avait parlé le prophète Esaïe quand il disait :
« Une
voix crie dans le désert : préparez le chemin du Seigneur,
rendez droits
ses sentiers ! » (Toujours dans le chapitre 3
de Mt)
Voici donc Jésus qui marche dans le désert ; pendant
40 jours il va jeûner et affronter le démon, c’est une épreuve
nécessaire puisqu’il
est venu nous visiter pour faire Alliance.
Dans un monde déjà marqué par le péché, Jésus va devoir se faire
connaître, lui la voix qui crie dans le désert, lui le Fils de Dieu, lui
le
Messie que le peuple attend. Mais déjà les tentations sont là et il doit
affronter et tenter de vaincre le Malin !
Sur la terre des hommes, le désert est un territoire
hostile et les conditions de vie y sont extrêmement difficiles.
Impossible pour
nous d’imaginer comment Jésus a pu endurer cette longue marche dans le
désert,
souffrant de la soif et de la faim, souffrant aussi de la solitude,
voire peut-être
de l’abandon !
De nos jours encore, des hommes et des femmes dans certains pays vivent
dans des zones arides, et ceux qui parmi vous ont pu se rendre en Terre
Sainte
ont certainement eu l’occasion de parcourir ces territoires désertiques
faits
de sable et de roches, je pense notamment au désert du Sinaï, là où se
trouve
le Mont Horeb, la montagne de Dieu, celle où Dieu a parlé à Moïse. Alors
bien-sûr,
pour les pèlerins que nous sommes, les parcours dans le désert se font
dans des
bus confortables et climatisés, et nous avons avec nous une quantité
d’eau
suffisante pour nous désaltérer ! rien à voir donc avec ce que qu’a
pu
endurer Jésus qui a marché seul dans le désert. Pendant 40 jours il
a jeûne
et prié son Père, se préparant à appeler les premiers disciples pour
annoncer
le Règne des Cieux : « A partir de ce moment, Jésus
commença à
proclamer : « convertissez-vous, le Règne des Cieux s’est
approché »
Ainsi, après tous ces jours dans
le désert, Jésus qui s’est
fait homme a faim, comme
nous-même aurions faim et soif dans une telle situation ! Pour
nous, l’eau et la nourriture ne manquent
pas, il suffit de nous rendre au supermarché pour nous
approvisionner ; Les
produits sont multiples et variés et les tentations nombreuses,
Mais alors, notre première tentation serait
peut-être d’abuser de cette abondance pendant que d’autres n’ont rien ou
pas
assez !
Pour Jésus dans le désert, nulle tentation, seulement des
anges qui s’approchent et qui le servent ! Le pain dont Jésus a
besoin n’est
pas celui qui est pétri par la main de l’homme, il est le pain de vie
promis
par le Père, celui qu’il va partager avec l’humanité tout entière :
« Notre
Père qui est aux Cieux, donnes-nous aujourd’hui notre pain de ce
jour »
Le désert dont nous parle Matthieu
dans ce passage nous
rappelle d’autres lieux, par exemple ceux où Jésus a multiplié les pains
pour
nourrir les premiers disciples. « . . . après avoir rendu
grâce, il
les rompit et les donnait aux disciples, et les disciples aux
foules. Et ils
mangèrent tous et furent rassasiés »
Ces jours-là, en multipliant et partageant les morceaux de pain, il a
transformé les disciples, puis les foules.
Car oui, cette nourriture offerte dans l’eucharistie nous
permet non seulement d’accueillir le Christ dans nos vies, mais elle
nous
oblige à vivre d’une autre manière, ce qui signifie pour nous de ne pas
rester
centrés sur notre propre vie. Aussi, lorsque nous nous avançons jusqu’à
la
table du Christ, et tout spécialement en ce temps de Carême, nous sommes
invités, en Eglise, à un temps particulier de rencontre avec le
Père et
le Fils, mais aussi à un temps de solidarité et de partage avec nos
frères et
sœurs.
Cette solidarité et ce partage nous engagent à aller vers les plus
démunis ; nous pouvons le faire ici dans notre pays de
Châteaubriant, mais
aussi au-delà vers ceux qui tentent de survivre sous les bombes ou
encore ceux
qui sont victimes de catastrophes naturelles ; nous pensons tout
particulièrement en ce moment à nos frères et sœurs en Ukraine, en
Turquie ou
en Syrie.
Alors rappelons-nous frères et sœurs
qu’il ne nous
suffit pas d’accueillir et de prendre le pain, mais qu’il nous faut
aussi le
partager ; de même qu’il nous faut également transformer les
déserts de
nos vies.
Frères
et sœurs, en
ce premier dimanche de Carême, nous inaugurons un temps renouvelé, un
temps
que l’on pourrait qualifier de temps de guérison et de Salut.
-
Un
temps de
guérison pour inscrire dans nos vies la volonté de nous rapprocher du
Christ et
de son Evangile ; en nous nourrissant un peu plus de sa Parole
puisque « l’homme
ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la
bouche de
Dieu ».
-
Un temps pour être sauvés en acceptant de choisir un chemin
de conversion à l’écoute de la Bonne Nouvelle et en accueillant en nous
l’Esprit Saint.
« Rends-nous
la
joie d’être sauvé, que l’Esprit généreux me soutienne »
(Psaume 50 le
mercredi des Cendres).
A
ces temps de guérison et de salut j’aimerai aussi ajouter ceux de désert
et de recréation. Le désert, ce serait tout ce qui nous éloigne
des autres,
nos errances et nos péchés, notre indifférence face à l’injustice,
parfois
aussi notre inaction ou encore notre manque de considération envers les
plus fragiles.
Toutes et tous nous sommes des êtres fragiles et
pécheurs, mais nous savons et nous croyons que par son sacrifice sur la
Croix,
le Christ nous a guéri du péché et nous a recréés par sa Résurrection.
Alors si dans le quotidien de nos vies nous pouvons être soumis à
diverses tentations telles que le pouvoir et l’argent, laissons-nous
plutôt
tentés par de réelles responsabilités et de vraies valeurs ; Aimons
et
servons les pauvres et les exclus, par son Fils faisons Alliance avec
Dieu.
« Seigneur, je ne suis pas digne de te recevoir, mais
dis seulement une Parole et je serais guéri ! »
Frères et sœurs, amis paroissiens, dans nos pauvretés, dans nos heures
de déserts et de nuits, ravivons en nous la lumière de l’Espérance,
ouvrons nos
cœurs et convertissons-nous afin de porter au monde la Bonne Nouvelle du
Christ,
lui qui pardonne et qui donne vie.
Amen
Joël MACARIO, diacre permanent
le
26
févier 2023