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8° dimanche ordinaire.


Vous ne l’avez peut être pas remarqué mais certains textes de la Bible, des Evangiles parfois, ne sont jamais lus à la Messe !
Il est apparu que ces textes paraissaient trop violents, trop décalés ou risquaient de nous entraîner à des contre sens.
Mais il y a aussi des textes que l’on aimerait ne pas entendre car ils sont trop dérangeants comme celui que nous venons d’entendre !
Un peu comme le jeune homme riche. Souvenez vous : «  Jésus lui dit : « Une seule chose te manque : va, vends tout ce que tu as, donne-le aux pauvres et tu auras un trésor au ciel ; puis viens et suis-moi. » Mais lui, à ces mots, devint sombre et s'en alla tout triste, car il avait de grands biens. » Je n’aimerais pas trop que Jésus s’adresse directement à moi pour me dire : va, vends tout ce que tu as, donne-le aux pauvres et tu auras un trésor au ciel ! Parce que après tout j’aime bien mon confort, j’ai mes petites habitudes !
C’est cela le piège avec l’argent.
Jésus le sait bien lui qui d’ailleurs ne condamne jamais la richesse et les biens terrestres pour eux-mêmes. Parmi ses amis figurent Joseph d’Arimathie, un « homme riche» ; Zachée déclaré « sauvé », même s’il garde pour lui la moitié de ses biens qui, étant donné son métier – percepteur d’impôts – devaient être considérables. Ce qu’il condamne c’est l’attachement exagéré à l’argent et aux biens, le fait d’en faire dépendre sa propre vie et d’accumuler des trésors uniquement pour soi (cf. Lc 12, 13-21).
« Ne vous faites pas tant de souci pour votre vie, au sujet de la nourriture, ni pour votre corps, au sujet des vêtements. La vie ne vaut-elle pas plus que la nourriture, et le corps plus que les vêtements ? » Mais enfin Jésus, j’ai une famille à nourrir, les études de mes enfants à prévoir, j’aimerais bien aider mes petits enfants à s’installer et cet argent je l’ai gagné honnêtement !
Et Jésus nous dit « Tout cela, les païens le recherchent. Mais votre Père céleste sait que vous en avez besoin. Cherchez d'abord son Royaume et sa justice, et tout cela vous sera donné par-dessus le marché. »
Le problème, aujourd’hui en 2011, en France, c’est qu’autour de nous le monde fait l’inverse : « Rien n’est impossible à Dieu », dit l’Ecriture ; et encore : « Tout est possible à celui qui croit ». Mais le monde dit : « Tout est possible pour celui qui a de l’argent ». Et nos contemporains en sont tellement persuadés que certains s’en sont littéralement fait un Dieu : regardez la crise financière que nous venons de traverser : elle a démarré car certains banquiers ont cru pouvoir s’enrichir en dépit de toute prudence et de toute morale en sachant très bien qu’il y aurait des perdants à ce jeu là (c'est-à-dire des familles expulsées de leur maison, des entreprises délocalisées alors qu’elles sont rentables, des agriculteurs aux abois, car ainsi va le système !)
Mais ce n’est pas toujours loin de nous. Ecoutez ce jeune homme qui est commercial dans une entreprise de notre région et qui était fier de me dire qu’il se mettait à son compte sur le même secteur d’activité en détournant la clientèle de son ancien employeur : il n’avait aucun état d’âme. Il n’y a plus aucunes règles quand il s’agit de s’enrichir même aux dépens de son voisin. Je pourrais ajouter à cela les multiples tentatives pour que le Dimanche devienne un jour comme les autres et que certains travaillent ce jour là pour le plus grand profit de quelques uns. C’est le sens de l’histoire m’a dit quelqu’un cette semaine. Comme si nous n’avions pas le choix !
Alors Benoît XVI nous dit : « Le mensonge, se revêt souvent d’une apparente vérité, mais en réalité il est toujours sélectif et tendancieux, orienté de manière égoïste vers une instrumentalisation de l’homme et, en définitive, vers sa soumission. »

Certains pourraient dire devant le désarroi de notre société « Le Seigneur m'a abandonnée, le Seigneur m'a oubliée. » comme nous l’a dit Isaïe. Mais il ajoute « Est-ce qu'une femme peut oublier son petit enfant ? Même si elle pouvait l'oublier, moi, [Dieu], je ne t'oublierai pas. »
Saint Paul ajoute « Frères, il faut que l'on nous regarde seulement comme les serviteurs du Christ et les intendants des mystères de Dieu. Et ce que l'on demande aux intendants, c'est en somme de mériter confiance. »
Et dans la lettre aux Hébreux : «  Que votre vie ne soit pas menée par l'amour de l'argent : contentez-vous de ce que vous avez, car Dieu lui-même a dit : Jamais je ne te lâcherai, jamais je ne t'abandonnerai. » (Heb 13, 05)

Dans notre langage actuel cela donne : selon Paul VI par exemple : « …la propriété privée ne constitue pour personne un droit inconditionnel et absolu. Nul n'est fondé à réserver à son usage exclusif ce qui passe son besoin, quand les autres manquent du nécessaire. En un mot, "le droit de propriété ne doit jamais s'exercer au détriment de l'utilité commune, ". (Paul VI, Populorum Progressio §23 – 1967)

Ou bien Jean Paul II :« … les biens de ce monde sont à l'origine destinés à tous. Le droit à la propriété privée est valable et nécessaire, mais il ne supprime pas la valeur de ce principe. Sur la propriété, en effet, pèse «une hypothèque sociale», c'est-à-dire que l'on y discerne, [comme qualité intrinsèque], une fonction sociale fondée et justifiée précisément par le principe de la destination universelle des biens. » (Jean-Paul II, Sollicitudo Rei Socialis §42 – 1987)

« Aucun homme ne peut servir deux maîtres : ou bien il détestera l'un et aimera l'autre, ou bien il s'attachera à l'un et méprisera l'autre. Vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l'Argent. »
Vous connaissez l’adage : « L'argent est un bon serviteur et un mauvais maître. »
Il peut nous entraîner vers l’avarice, l’envie, la cupidité mais aussi nous permettre d’être les intendants de Dieu sur terre : rappelez vous : « Faites-vous des amis avec l'Argent trompeur, afin que, le jour où il ne sera plus là, ces amis vous accueillent dans les demeures éternelles » (Lc 16, 9).
On dirait que Jésus conseille aux riches de transférer leur argent à l’étranger ! Mais pas en Suisse, au ciel ! De nombreuses personnes, affirme saint Augustin, se fatiguent à enterrer leur argent sous terre, se privant également du plaisir de le voir, parfois toute la vie, pour le simple fait de le savoir en lieu sûr. Pourquoi ne pas l’enterrer au ciel, où il serait bien plus en sûreté et où on le retrouverait, un jour, pour toujours ? Comment faire ? C’est simple, poursuit saint Augustin : à travers les pauvres, Dieu te donne des messagers. Ils se rendent là où tu espères aller un jour. Dieu en a besoin ici, dans le pauvre, et il te le rendra quand tu seras là-bas.

Mais il est évident que l’aumône facile et les œuvres de bienfaisance ne sont plus aujourd’hui les seuls moyens pour faire que la richesse serve au bien commun, ni même peut-être le plus recommandable. Il existe aussi celui de payer ses impôts de manière honnête, de créer de nouveaux postes de travail, de donner un salaire plus élevé aux ouvriers lorsque la situation le permet, de lancer des entreprises locales dans les pays en voie de développement. En d’autres termes, faire fructifier l’argent en le faisant circuler. Etre des canaux qui conduisent l’eau et non des lacs artificiels qui la retiennent uniquement pour soi-même.
Alors ouvrons nos yeux pour regarder autour de nous.
Ouvrons nos cœurs pour nous laisser toucher par la compassion.
Ouvrons nos mains pour apprendre à partager et « Ne vous faites pas tant de souci pour demain : demain se souciera de lui-même ; à chaque jour suffit sa peine. »

Philippe ARRIVE, diacre permanent.

VERTOU,
 26-27 Février 2011    


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