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6° dimanche du Temps Ordinaire.

 
Si 15, 15-20 ; Ps 118, 1-2, 4-5, 17-18, 33-34 ; 1 Co 2, 6-10 ; Mt 5, 17-37
          « Si tu le veux, tu peux observer les commandements » C’est la première phrase entendue dans les textes liturgiques d’aujourd’hui. Et la dernière : « Que ta parole soit oui si c’est oui, non si c’est non ». Entre ces 2 phrases, les auteurs bibliques nous ont parlé de liberté, de sagesse, de responsabilité. Et le fil rouge qui traverse tous ces textes, c’est la Loi.
La Loi. Pour nous, occidentaux baignés dans notre pensée post-moderne, la loi représente souvent une contrainte, un obstacle, un carcan. La loi promulgue évidemment des interdits, des limites. Et ces interdits sont parfois ressentis par un certain nombre de nos contemporains comme arbitraires, comme des brimades intolérables qu’il faut abolir, des entraves à la sacro-sainte liberté individuelle. Liberté individuelle, notion désormais érigée en valeur absolue, pour laquelle tous les combats deviennent légitimes. En conséquence de quoi, nos sociétés occidentales consacrent beaucoup de temps et d’énergie à modifier leurs lois, pour les faire évoluer, ce qui est bien normal. Mais ce faisant, elles semblent se focaliser désormais sur la conquête de « nouveaux droits » qui, en réalité bien souvent, ne sont que de nouvelles transgressions à des principes parfois millénaires qui fondent notre civilisation. Par le fait, les lois s’éloignent de plus en plus de la « loi naturelle », base élémentaire de toutes les lois humaines depuis que l’homme vit en société, partout dans le monde.
La loi, aujourd’hui perçue de manière si négative, revêt pourtant une tout autre signification pour les peuples anciens, et pour les hébreux en particulier, pour qui la Loi est le socle fondamental sur lequel a pu se construire le peuple juif. C’est la Loi donnée par Dieu à Moïse au Sinaï qui fondera le peuple de Dieu. Elle sera un « vade-mecum », un mode d’emploi de la vie en société, un code de bonne conduite au service du Bien Commun.
Et nous, chrétiens, nous sommes les héritiers de cette civilisation. La Loi de Dieu reste notre bien le plus précieux, et elle nous place devant notre responsabilité. En effet, c’est par la Loi que l’homme exerce sa liberté : « Si tu le veux, tu peux observer les commandements ». Il est de notre responsabilité d’observer la loi, nous avons le choix, personne ne nous y oblige, et Dieu lui-même « n’a commandé à personne d’être impie », il nous laisse la liberté de choisir : « la vie et la mort sont proposées aux hommes, l’une ou l’autre leur est donnée selon leur choix » nous dit Ben Sira le Sage.
La Loi de Dieu est donc bien une loi de liberté.
Certes, le mot liberté n’apparaît que très peu dans la Bible, tandis que le mot « Loi » est présent pratiquement à chaque page, de manière implicite ou explicite. Mais observer la Loi de Dieu, ce n’est pas appliquer un règlement, c’est justement exercer sa liberté, dans le cadre de ce qui est bien, de ce qui est beau, de ce qui est bon. C’est pourquoi le psalmiste peut écrire : « heureux ceux qui marchent suivant la loi du Seigneur ».
La Loi de Dieu est donc aussi une loi de sagesse. Parce qu’elle s’appuie sur la loi naturelle, elle vise à placer l’homme en harmonie avec ses semblables et avec la création.
Saint Paul, dans sa lettre à la communauté de Corinthe, constate pourtant que cette sagesse n’est pas la sagesse de ceux qui dirigent le monde. « C’est la sagesse du mystère de Dieu, sagesse tenue cachée, pour nous donner la gloire, […] et c’est à nous que Dieu, par l’Esprit, en a fait la révélation ».
Comme héritiers de cette révélation, nous en avons la responsabilité. Pas de liberté sans responsabilité. Les choix que nous faisons librement, les décisions que nous prenons, en toute connaissance de la Loi, engagent notre responsabilité, car nos décisions ont toujours des conséquences. Et nous ne pouvons pas prétendre exercer notre liberté sans en assumer les conséquences. Le sage est aussi celui qui assume librement tous ses choix.
Loi de sagesse, loi de liberté, loi de responsabilité. Or toute la Bible nous dit aussi, à longueur de pages, que la Loi, il ne faudrait pas l’oublier, c’est l’amour ! Amour de Dieu pour l’humanité, amour qu’il s’agit d’imiter pour le vivre entre nous. Observer la Loi, c’est mettre en pratique l’amour. « Aimez-vous les uns les autres » sera d’ailleurs le commandement nouveau de Jésus. Un commandement, c’est un article de loi.
Alors, quand Jésus, dans l’évangile d’aujourd’hui, nous dresse un sévère « rappel à la loi », ne nous méprenons pas. Son intention n’est pas de durcir un règlement, malgré les apparences, mais de nous mettre, encore une fois, face à nos responsabilités.
Il affirme qu’il n’est pas venu pour abolir la loi, mais pour l’accomplir. En effet, Jésus élargit le domaine des préceptes « vous avez appris qu’il a été dit… ; moi je vous dis… » Il ne dit pas le contraire de la loi ; il n’oppose pas la loi de Moïse à la sienne. En réalité, il l’approfondit. Il met en lumière ce que la loi pourrait avoir d’incomplet, si on la réduit à de simples interdits. Il élargit le champ d’application de la loi, il la fait mieux comprendre en la situant dans la seule loi qui plaît à Dieu, la loi de l’amour. Si Jésus paraît excessif dans son discours, c’est qu’il veut nous faire comprendre que nous devons considérer la loi dans sa cohérence, et donc que nous devons nous-même être en cohérence avec elle. Il nous pousse à prendre de la hauteur, à comprendre le sens de tous ces préceptes. Il nous montre, en somme, que l’amour est exigeant.
Alors, frères et sœurs, dans le quotidien qui est le nôtre ; dans les difficultés que nous pouvons traverser ; dans les choix qui sont devant nous ; gardons au cœur cette sagesse qu’est la Loi de Dieu, loi de liberté. Essayons de vivre au mieux selon cette loi, et d’exercer notre liberté avec la cohérence que commande l’amour.
« Que notre parole soit oui si c’est oui, non si c’est non. Ce qui est en plus vient du mauvais ».
 
Amen !
 
Daniel BICHET, diacre permanent
Monnières, Gétigné, Clisson
12 février 2023


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