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32° dimanche du Temps Ordinaire.

Frères et sœurs,

L'année liturgique fait défiler toute l'histoire du salut et comme elle se clôture bientôt, elle aborde « les derniers temps » : le retour du Christ est imminent (même si on ne connaît ni le jour ni l’heure), alors tenons-nous prêts, veillons dans la foi, la charité, l'espérance, la prière.

L'évangile nous propose aujourd'hui la parabole dite « des vierges prévoyantes et celles insouciantes ». Insouciantes ? Il ne s'agit pas ici de « têtes de linotte » ; il s'agit bien de personnes qui agissent délibérément selon leurs principes, leur philosophie de vie, selon leurs idées religieuses. Autrement, on pourrait croire que ce n'est pas de leur faute si elles agissent ainsi. Dans la Bible, l’insouciant, (le fou), c'est l'impie, celui qui refuse Dieu, qui mène une vie sans Dieu, contrairement au sage qui a fait le bon choix de s'en remettre à Dieu, de se fonder sur Dieu. La parabole des dix vierges rappelle qu'il n'y a que deux alternatives dans la vie : soit on choisit Dieu et on a la vie, soit on tourne le dos à Dieu et on va à la catastrophe. Comme lorsque Jésus compare l’homme qui bâtit sa maison sur le sable, contrairement à celui qui pose de solides fondations sur le roc, parce qu'il est prévoyant car, dans nos vies aussi, il y a des intempéries, des tempêtes et des tsunamis

Les enfants : dans l’évangile Jésus raconte une histoire… dix jeunes filles sont invitées à un mariage… elles attendent le marié avec des lampes à huile (comme dans Aladin)… il tarde à venir… 5 ont des réserves d’huile ; 5 non… leur lampe va s’éteindre, le marié ne les reconnaitra pas et elles ne participeront pas à la fête ! D’habitude Jésus nous apprend plutôt le partage ; pourquoi ici les jeunes filles ne partagent pas leur huile ?

Jésus nous raconte la parabole d’une fête de noce : Lui-même est le jeune marié ; il ne nous présente pas la mariée, parce que c’est tout le monde, chacune et chacun, et on dirait que l’heureuse élue sera choisie parmi ceux et celles du cortège nuptial qui ont de l’huile avec leurs lampes. Il y aura un instant fatidique où les imprévoyantes vont se révéler comme telles et le regretter, pendant que les sages vont être félicitées et s’en féliciter. Mais la pointe du récit, c’est cette huile qui va être le « révélateur ». Quelle est donc cette huile qu’on ne peut pas partager, qu’on ne peut pas emprunter ? Elle n’est sûrement pas le privilège de quelques fortunés, puisque tout le monde peut s’en procurer, mais à temps, à l’avance et en l’ayant près de soi tout le temps. Chaque homme a quelque chose en quoi il « croit » qui le maintient debout en marche : un grand idéal, de grandes convictions, on parle carrément d’une « foi », même quand ce n’est pas la foi en Dieu. Et cette foi doit être alimentée par une « pratique », par une vigilance de tous les instants. Et dans ce domaine, toute imprévoyance est coupable, car c’est tellement personnel que personne d’autre ne peut nous donner de sa foi ni de sa vigilance. Je pense par exemple aux grands sportifs, personne ne peut s’entraîner à leur place ; une maman qui attend un bébé, personne ne peut être à sa place ; un élève qui veut réussir dans la vie, ne peut compter sur le copain qui lui fait ses devoirs ; l’époux qui fonde un foyer avec la femme de sa vie, ne peut pas déléguer ni se faire remplacer… Nul ne peut alimenter la flamme de l’amour d’un autre. Nous comprenons alors que la vierge sage ne peut rien pour la vierge insouciante : ce n'est pas de l'égoïsme si elle dit qu'elle n'en a pas pour elle-même et pour les autres, c'est qu'il y a ce qui ne se prête pas, ne se partage pas. On ne prête pas son corps, on ne prête pas l'amour, on ne prête pas son passé, on ne prête pas sa vie...

La vie chrétienne est, elle aussi, une flamme d’amour à alimenter personnellement et quotidiennement. Quand l’Epoux arrive, chaque fois que Jésus vient, il doit la trouver allumée ; toute imprévoyance sera sanctionnée, parce qu’elle prouve que l’arrivée du Seigneur était le dernier de nos soucis. Nous n’avons pas à lui reprocher d’être sévère, car le tort est de notre côté, du seul fait de ne pas être prêt pour entrer à la fête. Comment vivre la fête sans s’y préparer ? Ce ne sera pas sa faute, si on tombe en panne sèche, si on n’a pas fait le plein à temps et suffisamment, si on ne se soucie pas de recharger ses batteries à temps, si on n’a pas pris au sérieux l’enjeu et l’importance de son invitation…

Comment et avec quoi faire le plein ? Faut-il disposer de ressources financières pour cela ? Faut-il fournir des efforts héroïques ? Non bien sûr, car dans ce cas, ce ne serait réservé qu’à des élites. Or la vie chrétienne, c’est ce qui a été caché aux sages et aux savants pour être révélé en plénitude aux humbles et aux petits

Sainte Mère Teresa de Calcutta disait : « Ne vous imaginez pas que l’Amour, pour être vrai, doit être extraordinaire. Ce dont on a besoin, c’est de continuer à aimer. Comment une lampe brille-t-elle, si ce n’est par l’apport continuel de petites gouttes d’huile ? Qu’il n’y ait plus de gouttes d’huile, il n’y aura plus de lumière, et l’Epoux dira : « Je ne te connais pas ». Mes amis, que sont ces gouttes d’huile dans nos lampes ? Elles sont les petites choses de la vie de tous les jours : la joie, la générosité, les petites paroles de bonté, l’humilité et la patience, simplement aussi une pensée pour les autres, notre manière de faire silence, d’écouter, de regarder, de pardonner, de parler et d’agir. Voilà les véritables gouttes d’Amour qui font brûler toute une vie d’une vive flamme. Ne cherchez donc pas Jésus au loin ; il n’est pas que là-bas, il est en vous. Entretenez bien la lampe et vous le verrez. »

Voilà ce à quoi nous invite Sainte Mère Teresa : vivre l’Amour simplement et quotidiennement ; autrement dit, vivre ensemble chaque jour comme des frères et des sœurs… Et bien justement, pour nous sensibiliser à cette réalité, notre Diocèse nous invite samedi et dimanche prochain au Festival de la Fraternité (cf. bulletin)… 10 ans après Diaconia 2013, il permettra de mettre en valeur le service de la fraternité, à l’occasion de la journée mondiale des pauvres et de la journée nationale du Secours Catholique Caritas France. Cet évènement est ouvert à toutes et tous, avec une invitation particulière pour les personnes en situation de précarité et les acteurs de la solidarité. Il permettra de partager des expériences vécues dans les paroisses et les mouvements, d’échanger en toute convivialité, autour des initiatives visant à développer la fraternité et l’attention vers les plus fragiles. Si vous pensez que vos lampes ont besoin d’huile nouvelle, ce Festival est fait pour vous !

F&S, vous l’aurez compris : la rencontre avec Dieu, ce n'est donc pas l'affaire de l’instant fatidique où le cri retentit que l'époux est là, c’est l'histoire de toute une vie ; ce n'est pas au fameux dernier jour que le chrétien se souviendra qu'il devait entretenir sa vie chrétienne, comme une lampe qui devait rester allumée avec de la réserve pour l'alimenter jour et nuit.

L'huile pour nos lampes de la vie, ce sont donc nos œuvres fraternelles, en y ajoutant aussi la prière. L'Eglise a toujours recommandé la prière comme le moyen le plus sûr de veiller ; soyons donc fidèles à une prière quotidienne, une prière joyeuse, une prière contre l'assoupissement de la routine. Grâce à la prière, nous savons veiller à ce qui est essentiel, au vrai bonheur, à la vraie vie, au grand amour, plutôt que d'avoir la tête ailleurs. Elle nous permet de sortir à la rencontre de Jésus (l'Epoux), de sortir de notre quotidien trop programmé, trop surchargé ou alors sans relief, un quotidien où l’on s'assoupit sous le poids des habitudes. Elle stimule et permet de tenir dans les difficultés, les doutes, les crises ; elle protège notre flamme contre les courants d’air de l’erreur, de l’incroyance, de l’esprit du monde et de ses tentations.

Oui F&S, les lectures de ce jour nous enseignent le bon usage de l'incertitude dans la foi. Il s'agit peut-être de se préparer à mourir, mais en apprenant à vivre. Vivre en état de veille, non pas dans l'angoisse stérile du lendemain, mais dans l'attente confiante, pour un soir de fête : notre Foi au Christ mort et ressuscité nous conduit à l'Espérance de la rencontre ; (puissions-nous, à l’occasion du 11/11, partager cette vision avec nos frères et sœurs anciens combattants qui représentent ici celles et ceux qui ont donné leur vie pour la France). Depuis notre baptême, nous avons reçu la Lumière du Christ et nous sommes la lumière du monde ; alors si nos lampes sont éteintes, faute d'huile, l’Époux ne peut pas nous reconnaître : « Amen, je vous le dis, je ne vous connais pas. » ; mais si nous sommes suffisamment semblables à Lui, il nous reconnaîtra.

Veiller, c'est donc vivre au jour le jour cette ressemblance avec Jésus et avec son Père, pour laquelle nous sommes faits : c'est aimer comme Lui. Chose impossible, sommes-nous tenter de dire... Heureusement, cette ressemblance d'amour est cadeau ; il nous suffit « de la désirer, de la chercher » comme la Sagesse dans la 1ère lecture et comme nous y invite le psalmiste : « Dieu, tu es mon Dieu, je te cherche dès l'aube ». Veiller, en fin de compte, c'est être toujours prêt à Le recevoir, éclairés par nos lampes remplies de l’huile de la Fraternité !

Heureux les invités au repas des noces de l’Agneau…

Amen.

 

Patrick JAVANAUD, diacre permanent

12 novembre 2023




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