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28° dimanche ordinaire.

28° ordinaire.

Quand Jésus raconte cette parabole, il s’adresse aux grands prêtres et aux pharisiens. Sans aucun doute, ces paroles ont dû continuer de les irriter. Déjà, juste avant cette parabole, l’évangile de Matthieu nous disait : « En entendant ses paraboles, les grands prêtres et les Pharisiens comprirent que c'était d'eux qu'il parlait. Ils cherchaient à l'arrêter. » Et voilà qu’il en rajoute une couche ! En effet, à qui Jésus fait-il allusion, lorsqu’il parle des invités de ce roi qui célébrait les noces de son fils ? Pour eux, c’est très clair : le roi, c’est évidemment Dieu ; son fils, c’est celui qui doit venir, le Messie ; et ses noces, les « noces de l’Agneau », c’est l’image reprise dans de nombreux textes de l’Ancien et du Nouveau Testament, celle du banquet du Royaume des Cieux, de la vie éternelle auprès de Dieu. Dans le rôle des invités, ils se sont reconnus, ce sont bien évidemment les juifs, le peuple d’Israël. Le peuple choisi dès l’origine, les invités naturels à la première place dans le Royaume. Et Jésus prétend que ses invités refuseraient l’invitation, qu’ils ont d’autres préoccupations, plus importantes selon eux. Bref, ils ont autre chose à faire ! « Le repas de noce est prêt, mais les invités n'en étaient pas dignes ». Scandale pour des oreilles aussi religieuses que celle des pharisiens et des grands prêtres ! Et dans la suite de la parabole, la réaction du roi est alors encore plus scandaleuse : il invite à leur place tout le monde et n’importe qui ! « Les mauvais comme les bons » ! Comment des juifs fervents, soucieux de respecter scrupuleusement la Loi de Moïse, peuvent-il entendre une telle parole ? C’est intolérable, c’est un véritable blasphème ! Prétendre que Dieu préfèrera les païens au peuple élu, c’est lui faire injure d’une manière inacceptable !
Et pourtant, cette parabole, elle s’applique aussi à nous-mêmes, aujourd’hui ! Nous aussi, qui sommes chrétiens, nous sommes le peuple de Dieu, les invités naturels à la table du Royaume. Comment pouvons-nous tolérer que Jésus nous dise que d’autres, qui ne sont pas chrétiens, « les mauvais comme les bons » seront invités à notre place ? Nous qui avons déjà tant de mal à « obtenir notre salut », à « gagner notre Ciel » comme on disait autrefois, voilà que tous nos efforts seraient vains, inutiles ? à quoi bon, alors, toutes nos bonnes actions, tous nos « sacrifices » ? Eh bien c’est sans doute que nous avons encore du mal à nous convertir, à changer notre regard. Car Dieu, en effet, invite tout le monde à son banquet. « les mauvais comme les bons ». Ce ne sont pas nos propres sacrifices, petits ou grands, qui sauvent l’humanité, ou une petite partie d’humanité, même s’il nous arrive heureusement de faire le bien. C’est le sacrifice de Jésus par sa passion et par sa croix qui, une fois pour toutes, définitivement, sauve le monde. C’est même pour ça qu’il est venu ! Dieu ne se contente pas de faire plaisir à un « fan club » à qui il accorderait des privilèges pour les remercier de leur soutien. Il aime autant, d’un même amour infini, chacun des êtres à qui il donne la vie. « Les mauvais comme les bons » ! Et il les invite tous à son banquet.
Alors, à quoi bon se donner tant de mal à essayer de faire le bien ?

C’est alors que l’on peut mieux comprendre la fin de cette parabole, cet épisode final de l’invité qui n’a pas le vêtement de noces et que le roi jette dehors. Souvent, cette conclusion de la parabole nous surprend, nous déstabilise, ou peut-être même nous scandalise. Alors, il peut être utile de nous arrêter un instant sur cet épisode final.
Certes, tout le monde est invité, « les mauvais comme les bons ». C’est par pure générosité de la part de Dieu que nous sommes appelés, pas à cause de nos mérites. Car tous, si nous nous posons la question « suis-je digne du Ciel ? », et que nous sommes honnêtes, nous savons que notre réponse est « non ». Mais ce n’est pas cette question que Dieu nous pose. Il ne nous demande pas si nous en sommes dignes. La vraie question est : « est-ce que j’accepte vraiment comme don ce que Dieu me donne ? ». Car de toute façon, que je le veuille ou non, Dieu donne. Libre à moi d’accepter ce don, d’habiller mon cœur du vêtement de noces que Dieu a taillé sur mesure pour moi. C’est ce qu’on appelle répondre à sa vocation. Libre à moi de le refuser et de considérer que tout ce que j’ai, tout ce que je suis, je ne le dois à personne d’autre qu’à moi-même. C’est cet orgueil qui nous déshabille le cœur aux yeux de Dieu, mais aussi à nos propres yeux et aussi aux yeux des autres. Le refus de porter le vêtement de noces, ce n’est pas la simple ignorance des conventions vestimentaires. C’est l’attitude volontairement provocatrice de celui qui, se sachant invité, décide de profiter du festin sans accepter en retour de donner un minimum de lui-même, de s’ajuster à la grâce qui lui est faite par cette invitation. Pas plus. Alors, pour que nous soyons revêtus du vêtement de noces, que devons-nous faire ? Une réponse se trouve dans le livre d’Isaïe, au chapitre 25, que nous avons entendu dans la première lecture : il y est question aussi d’un festin « de viandes grasses et de vins capiteux », que le Seigneur aura préparé « pour tous les peuples, sur la montagne ». Tous les peuples, c’est à dire encore une fois « les mauvais comme les bons », les croyants comme les païens ; et « sur la montagne », c’est-à-dire dans son royaume. Et la réponse à la question « que devons-nous faire ? Comment revêtir ce vêtement de noces ? », la voici au verset 9 de ce passage d’Isaïe : « Et ce jour-là, on dira : « voici votre Dieu, en lui nous espérions, et il nous a sauvés ; c’est lui le Seigneur, en lui nous espérions ; exultons, réjouissons-nous : il nous a sauvés ! » Voici ce qui nous est demandé : faire simplement cet acte de foi envers Dieu, reconnaître humblement qu’il est Dieu, que tout nous vient de lui, et que c’est lui qui nous sauve. Repousser notre orgueil qui nous fait croire que nous pouvons nous sauver nous-mêmes. Si nous sommes dans cette disposition de cœur, si nous sommes revêtus de ce vêtement d’humilité, alors, Dieu nous accueillera avec joie, et nous pourrons nous réjouir nous aussi, avec tous nos frères, au banquet des noces de son fils.
Amen !


Daniel BICHET, diacre permanent,
le 9 octobre 2008
St Lumine de Clisson, Gorges, Monnières


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