26° dimanche ordinaire.
À bien écouter les lectures de ce dimanche, on
comprend assez vite que l’Église veut aujourd'hui nous interpeller sur
notre façon de nous comporter, sur notre conduite. C'est assez clair,
dès la première lecture du livre d'Ezekiel. Le prophète nous parle au
nom du Seigneur avec ces mots : « vous dites : La conduite du Seigneur est étrange. Est-ce ma conduite qui est étrange ? N'est-ce pas plutôt la vôtre ?
» et il est ensuite question d'un juste qui se détourne de la justice
et qui court ainsi à sa perte, puis d'un méchant qui se tourne vers la
justice et sauve ainsi sa vie. Il s'agit dans les deux cas d'un
changement de direction, l'un pour le bien, l'autre pour le mal.
Ce changement de direction, Jésus
le reprend dans l'évangile selon St Matthieu, avec cette petite
parabole des deux fils dont l'un dit oui et ne fait pas, et l'autre dit
non mais finit par aller travailler à la vigne de son père. Il y aurait
ainsi le bon fils et le mauvais fils, comme il y avait le juste et le
méchant dans l'histoire d'Ezechiel.
Cette vision un peu manichéenne,
être juste ou être méchant, faire le bien ou faire le mal – avec des
revirements et des changements de cap, du bien vers le mal ou du mal
vers le bien – peut nous sembler un peu trop tranchée, sans nuances.
Dans la réalité de nos vies, c'est souvent beaucoup plus compliqué, et
nous avons parfois du mal à savoir si nous sommes sur le chemin du bien
ou sur celui du mal. Il peut même nous arriver, parfois, de ne plus
trop savoir où nous en sommes, tant le mal et le bien nous semblent
enchevêtrés dans nos actions, nos prises de position, nos simples choix
de chaque jour. C'est de plus en plus vrai dans notre monde actuel, où
les notions mêmes de bien et de mal sont tellement relativisées
qu'elles finissent pas se dissoudre dans une espèce de consensus
informe, où tout est possible parce que rien n'est vraiment bien, rien
n'est vraiment mal. Le mal et le bien n'existent plus.
Dans ces conditions, comment s'y
retrouver ? Où trouver le bon chemin, la bonne direction, quand tous
les panneaux indicateurs nous disent que tous les chemins sont
possibles, que toutes les directions se valent ?
Alors, nous nous retrouvons désemparés, désorientés, dans la situation
du psalmiste, celui qui a écrit le Psaume 24 il y a près de trois mille
ans, que nous avons chanté tout à l'heure :
« Seigneur, enseigne-moi tes voies,
fais-moi connaître ta route.
Dirige-moi par ta vérité,
enseigne-moi,
car tu es le Dieu qui me sauve. »
Nous sommes perdus, et nous
appelons le Seigneur à notre secours, pour qu'il nous indique la bonne
route. Car en réalité, et nous le pressentons bien, il n'y a pas que
des bons chemins, malgré ce que nous pouvons entendre autour de nous et
ce que nous répètent les médias.
Alors, si vous le voulez bien, je vous propose de faire un test qui
nous permettra de savoir si notre conduite générale est plutôt bonne ou
plutôt mauvaise, c'est à dire en fait si elle nous rapproche de Dieu ou
nous en éloigne. C'est le test du clignotant.
Ah ce clignotant ! Accessoire pas
très gros, mais pourtant indispensable sur tous les véhicules à moteur,
à tel point qu'une simple ampoule de clignotant grillée vous oblige à
passer une contre-visite – et à repasser à la caisse – pour continuer à
utiliser votre véhicule. Interdit de rouler avec un clignotant hors
d'usage ! Et pourtant, vous l'avez remarqué comme moi, chez beaucoup
d'automobilistes, le clignotant n'est pas vraiment l'élément le plus
utilisé !
Mais à quoi sert-il ?
Contrairement à la plupart des accessoires de sécurité dont sont
bardées nos véhicules actuels, les clignotants de ma voiture n'ont pas
pour but de me protéger, moi, mais ils contribuent à assurer la
sécurité des autres, en les informant de mes intentions. C'est
pourquoi, en réalité, je ne risque pas grand-chose pour moi-même en
négligeant de déclencher mon clignotant quand je veux changer de
direction. C'est le conducteur juste derrière moi qui peut risquer
l'accident s'il doit réagir brusquement. Ou celui en face de moi, sur
le rond-point, qui pestera si je l'oblige à s'arrêter, croyant que je
vais passer devant lui alors que je prends la première sortie.
Mine de rien, ce petit voyant
lumineux est le révélateur de notre conduite. De notre conduite
automobile bien sûr, mais aussi de notre conduite tout court, notre
façon de nous comporter dans la vie. Et voici en quoi consiste le
fameux test du clignotant : Posons-nous tout simplement, pour
nous-mêmes la question : « Quel usage est-ce que je fais du clignotant
? » Ce n'est pas très compliqué, mais faisons-le tout de même,
honnêtement. Sommes-nous très scrupuleux, en l'utilisant
systématiquement quand le code de la route le demande ? Dans ce
cas, plusieurs possibilités : soit nous le faisons parce que nous
avons « la peur du gendarme » ; soit nous le faisons par simple
habitude ; ou encore, nous mettons notre clignotant simplement pour ne
pas avoir d'ennui ; soit enfin nous le faisons, en conscience, parce
que nous savons que les autres usagers de la route en ont besoin, et
que ça leur rend service. Un tout petit geste peu coûteux qui peut
rendre service, ça ne se refuse pas !
Ou alors au contraire, avons-nous
tendance à oublier souvent de clignoter ? Ou pire encore, refusons-nous
de le faire ? Dans ce cas, demandons-nous honnêtement si c'est
par simple paresse, ou par mauvaise habitude, ou par négligence, ou
encore par mépris pour les autres usagers de la route. Quoi qu'il en
soit, le test du clignotant est un excellent révélateur de notre
attitude vis-à-vis des autres. Il permet en tout cas de nous situer par
rapport à l'interpellation de St Paul dans sa lettre aux Philippiens,
c'était la deuxième lecture : « Que chacun de vous ne soit pas
préoccupé de lui-même, mais aussi des autres. »
Mettre son clignotant, c'est avoir le soucis des autres. Ne pas le mettre, c'est être plus préoccupé de soi-même.
Ainsi, ce petit voyant lumineux,
qui habituellement n'éclaire pas grand-chose, apporte un puissant
éclairage sur nous-mêmes, sur notre conduite. Il en dit long sur notre
relation à nous-mêmes et aux autres.
Quand nous aurons fait ce test,
quand nous aurons répondu avec franchise et en vérité sur notre usage
du clignotant, nous saurons mieux nous situer vis-à-vis de Dieu,
vis-à-vis des autres et de nous-mêmes. Et si nous découvrons que nous
sommes sur une mauvaise voie, comme le deuxième fils de la parabole qui
dit non puis se ravise, rien ne nous empêche, nous aussi comme lui, de
changer de direction. Mais alors, attention ! n'oublions pas de mettre
notre clignotant !
Amen !
Daniel BICHET, diacre permanent.
28 septembre 2014
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