Frères
et
sœurs,
Je
me suis bien renseigné, bien documenté et je vous assure que ce n’est
pas un fake-news (désinforma3on) : Dieu
fait du pardon échangé la condion du salut ! Vous
avez
entendu ? Notre-Seigneur fait du pardon échangé la condi3on de notre
salut ! Si nous croyons en
l’évangile de Jésus-Christ (et notre présence dans ce=e assemblée
semble le confirmer), le pardon accordé à un frère, une sœur qui m’a
blessé, est le
chemin du Ciel.
Pourtant,
nous
avons du mal à pardonner parce que nous sommes des êtres fragiles, des
êtres sensibles, des êtres confrontés et quelquefois ballotés par le
péché. Mais si Dieu fait miséricorde, si près de Lui se trouve le
pardon, s’il entend la plainte de ma prière quand je cris vers Lui,
s’il ne re3ent pas les fautes contre nous, nous sommes alors capables,
frères et sœurs, d’ouvrir nos cœurs à sa grandeur et de pardonner.
Dans
la première lecture de ce dimanche, Ben Sira le Sage nous invite à
l’indulgence. Pour prêcher l’indulgence, il développe un premier
argument : «
Pense à l’Alliance du Très-Haut et sois indulgent pour qui ne sait pas
», c’est- à-dire pense à
la fidélité de Dieu, tout au long de l’histoire, envers son peuple si
souvent infidèle, individuellement et collec3vement.
Deuxième
argument
: «
Pense aux commandements et ne garde pas de rancune envers le prochain ». Or que disent les deux
premiers commandements ? « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu du tout ton
cœur et ton prochain comme toi- même ». Aimer son prochain comme
soi-même, cela implique évidemment, en beaucoup de circonstances, de
savoir pardonner.
Troisième
argument
: «
Pense à ton sort final et renonce à toute haine, pense à ton déclin
et à ta mort ».
Est-ce uniquement la pensée de notre mort, frères et sœurs, qui doit
nous inciter à l’indulgence envers les autres ? Ce 3ème
argument est un appel à la lucidité sur notre pe3tesse : nous
qui sommes poussière, qui sommes-nous pour condamner défini3vement les
autres? C’est donc une manière de nous rappeler que nous allons tous
comparaître devant Dieu et c’est alors que notre propre pe3tesse
s’étalera au grand jour.
Pour Ben Sira le Sage, le pardon
consiste, non pas à oublier ou ignorer un passé qu’on ne peut ni
oublier ni ignorer de toute manière, mais
à passer par-dessus,
à essayer de vivre avec et de renouer la rela3on qui a été coupée
par l’offense ; de reproposer son ami3é, sa confiance et cela consiste
à accepter
qu’il y ait encore un avenir possible.
Le mot « Pardon », étymologiquement, veut bien dire cela ; il s’écrit
en deux par3es « par et don » : c’est-à-dire le don parfait, le don
par-delà l’offense. Parce qu’il est parfait, il ne peut être en nous
que l’œuvre de l’Esprit Saint.
«
Seule
la charité sauvera le monde »,
telle était la devise de saint Luigi Orione, prêtre italien et élève
de saint Jean Bosco. « Seule
la charité sauvera le monde.
» En ces temps troubles que nous traversons, dans notre Église, dans
notre société, dans nos rela3ons, dans le rejet de l’autre, ce=e
devise doit résonner dans nos cœurs, frères et sœurs et être le
fondement de notre voca3on de chré3ens.
La charité ne peut s’exercer sans passer par-dessus l’offense ! on
ne peut certes pas effacer une offense... les coups d’éponge n’existent
pas... mais on peut passer par-dessus.
Depuis
notre
baptême, nous appartenons au Christ (c’est St Paul qui nous le
rappelle/ 2ème
lecture).
Et si nous appartenons au Christ, nous nous offrons à Lui corps et
âme, car le royaume de Dieu est jus3ce, joie et paix dans
l’Esprit-Saint.
Nous
sommes
alors capables de servir Dieu avec sincérité, de construire des
rela3ons, de chercher la paix, de bâ3r la communauté, nous sommes
capables de tolérance, d’amour mutuel et de pardon ... malgré nos
différences, malgré nos choix mul3ples, nos divergences, nos
engagements opposés, notre manière de prier et de se sanc3fier. Nous
pouvons, au nom du même Baptême, prendre des décisions complètement
opposées. Mais malheureusement, nous ne sommes souvent pas tolérants
les uns envers les autres, et malgré nos bonnes inten3ons, ils nous
arrivent de blesser ou à l’inverse d’être mépriser, calomnier ...
La
grande
convic3on de st Paul, c’est la solidarité très étroite qui nous unit
les uns aux autres, à travers le temps et l’espace. Ce=e solidarité ne
supporte pas les divisions et les déchirures. « N’ayez de de=e envers
personne sauf celle de l’amour mutuel, nous dit encore l’apôtre du
Seigneur ; car celui qui aime ses frères et sœurs et par extension sait
pardonner, accompli pleinement la Loi ». C’était la lecture de dimanche
dernier.
Ainsi
donc,
qu’est ce qui fait que nous peinons sur ce chemin, alors que nous savons
que c’est vital, absolument vital de pardonner, puisque Dieu le
condi3onne
au
salut ? Sans doute que dans notre société d’aujourd’hui, pardonner est
devenu signe de faiblesse ; On entend souvent dire : « pardonner, c’est
trop facile, il faut qu’il paye ! » ou encore : « Pardonner pour qu’elle
recommence, de toute manière je n’ai plus confiance ! ». Dans ce=e
société qui qui devient souvent impitoyable, pardonner n’est pas
forcément bien vu.
Pourtant
le
pardon ne demande pas d’oublier, ni de ne pas crier sa colère, il
n’absout pas la responsabilité des actes, il est chemin, il prend du
temps, il n’a=end même pas la repentance de l’autre. Sans ce don
gratuit par-delà l’offense, que serait l’amour ? Sans pouvoir se
réconcilier avec soi-même, avec les autres, avec Dieu, que serait la
vie ?
L’Eglise,
frères
et sœurs, forte de son expérience spirituelle, à la fois théologique
et humaine, faite de la connaissance du cœur de Dieu et de la
connaissance du cœur de l’homme, nous propose un chemin de pardon.
Et
ce chemin se fait en 5
étapes
:
1ère
étape : L’examen de conscience
Pour
demander
pardon il faut d’abord être conscient du mal que j’ai fait. Tant que je
ne vois pas le mal, je suis incapable de changer, de me convertir. Il y
a deux choses qui peuvent m’aider à discerner : la parole de Dieu aussi
douce que le miel et aussi tranchante qu’un glaive mais aussi la parole
de mon frère/ma sœur et la correction fraternelle qui m’aide à y voir
clair dans ma vie, quand j’accepte qu’il/elle me reprenne.
2ème
étape : Le regret
Une
chose
est de voir le mal que j’ai pu faire ; autre chose est de le regretter.
Il nous arrive de voir clairement ce que nous devrions changer dans
notre vie, mais de n’avoir aucune envie de le faire, de n’attendre en
réalité qu’une chose, c’est que l’autre change. Le manque de regret
durcit le cœur, pourtant le regret est un don de Dieu et il faut le
demander au Seigneur. Seigneur ! montre-moi combien peut blesser le mal
que je fais. Seigneur donne-moi de regretter ce mal. Car sans regret, il
n’y a pas de conversion.
3ème
étape : L’aveu
J’ai
pris
conscience du mal que j’ai fait, je le regrette mais tant que je ne suis
pas allé trouver mon frère pour lui dire, « je te demande pardon pour
ceci », le pardon est impossible (ou en tout cas très incomplet). Nous
avons besoin de nous parler, nous sommes des êtres de paroles, des
êtres de relation, c’est par
des
paroles
que nous nous détruisons, c’est aussi par la parole que nous nous
édifions.
Le
pardon
demande l’aveu. Et l’aveu, c’est de dire : je te demande pardon pour cet
acte que j’ai fait et que je regrette « du fond du cœur », pas du bout
des lèvres. Mais du fond du cœur.
Le
ferme propos
La
quatrième
étape du pardon c’est le ferme propos. Bien entendu, si je dis « je te
demande pardon » mais que je ne fais rien pour changer, alors c’est du
vent et je risque de décourager un frère, une sœur dans le chemin
qu’il (elle) a à faire pour m’accorder pleinement son pardon. Le ferme
propos c’est de la stratégie pour éviter de retomber dans le même
péché, dans le même mal.
Nous
croyons
avoir demandé pardon, mais nous gardons en nous le germe, la racine du
mal alors que nous devrions s’inspirer de la Parole de Dieu pour
l’éradiquer et cultiver la bienveillance et la douceur.
La
réparation
La
cinquième
étape c’est la réparation. Le mal que j’ai fait, je dois le réparer,
le réparer concrètement, alors bien entendu tout n’est pas réparable
à l’identique, bien souvent une parole dure ou injuste, une
infidélité quelconque va laisser longtemps une cicatrice dans notre
cœur (peut-être même laisser toujours une trace, une trace qui ne sera
plus douloureuse, mais qui sera visible, comme la marque de notre
fragilité). Mais, nous pouvons toujours poser, inventer des gestes, des
paroles, des moments privilégiés qui vont être comme un baume, un
baume réparateur sur la blessure infligée.
...
L’examen
de conscience, le regret, l’aveu, le ferme propos, la réparation ... voilà
donc
5 étapes, frères et sœurs, pour pardonner du
fond de son cœur, pour progresser vers la
volonté de Dieu. Jésus, par ses actes et ses miracles, n’a-t-il pas
restauré tous ceux et celles qui ont croisés son chemin, tous les
témoins de son amour ? Jamais le Christ n’a fait de reproche sans
ouvrir l’avenir, l’avenir éternel.
C’est
au
nom de l’amour qu’il l’a fait, car
le nom de Jésus est miséricorde !
Amen.
Patrick CHAHLA, diacre permanent
le 17 septembre 2023